Notre petite soeur

by - octobre 27, 2018



NOTRE PETITE SOEUR
de Hirokazu Kore-eda

Ce film est perfection, alors que je ne suis qu'imperfections. Mais je vais essayer de vous parler de ce petit bijou. J'ai été très étonnée de m'apercevoir combien les gens étaient partagés au sujet de ce film. Alors venez le voir avec mes yeux, mettez vos pas dans les nôtres et rencontrez ce magnifique long métrage qui fit l'unanimité chez nous.

Trois sœurs vivent ensemble dans la maison que leur a légué leur grand mère. Elles ont toutes la vingtaine. Un jour elles apprennent que leur père qu'elles n'ont pas vu depuis quinze ans est mort et va être enterré dans la ville balnéaire où il vivait. Elles apprennent également, que la femme avec laquelle il était parti est morte, et qu'il avait une autre fille qui a quatorze ans aujourd'hui. Et qu'à la fin de sa vie il s'était remarié avec une troisième femme. Lors des funérailles, les sœurs rencontrent leur demi sœur; la « grande sœur » avec son œil d'infirmière habitué à jauger des situations, devine la personnalité de la femme de leur père et comprend tout le poids qui pèse sur les épaules de la « petite sœur ». Alors assez naturellement, au moment où les trois sœurs aînées ont un pied dans le train, elles lui proposent de venir vivre avec elles. Et c'est comme ça que Suzu aménagea chez ses sœurs.

Si ce film a un joli titre en français, en japonais il se nomme Umimachi diary soit « le journal de la ville de la mer ». titre qui plante un décor. Il est tiré de l'oeuvre de la mangaka japonaise Akimi Yoshida,c'est un Josei manga qui se nomme Kamakura diary. Un josei manga est un manga dont la cible éditoriale sont des femmes entre 15 et 30 ans, et parfois un peu plus âgées. Ils abordent des sujets matures, avec des représentations plus crues, et plus violentes psychologiquement. Les histoires d'amours sont souvent éphémères, les relations sexuelles sont explicites, les thèmes sont plus durs comme la drogue, le viol... et par exemple ici la mort. On y voit les personnages boire et fumer.

Si je n'ai pas encore fini de lire le premier tome de ce manga qui en compte sept en français, il paraît évident que Kore-eda a tenu à rester proche de ce matériel.
Des les premières images du film, les costumes et même les coupes de cheveux de certaines sont proches de celles du manga tout en gardant ce qui fait la signature du cinéma de Kore-eda.
C'est d'abord un cinéma lumineux, avec une volonté d’utiliser les lumières naturelles. Avec des scènes en extérieur sublimes comme celles autour de cerisiers en fleurs, ou celle d'un feu d'artifice sur l'océan. Sa lumière est une signature, elle est toujours pleine de nuance
et semble nimber ce paysage d'une ambiance "aquarellée". 
Tout comme le choix de ces décors naturels, les points de vues à couper le souffle qui vous immergent dans cette histoire, sont la patte du réalisateur. Ou encore les scènes de « cuisine »,où  les femmes se regroupent autour d'un plat que ce soit  pour le cuisiner ou pour le manger. Des moments qui font sens. Mais un sens différent dans chaque film. ici, ils parlent de transmission, de protections,et de souvenirs. Ces moments plein de délicatesse où les protagonistes nous invitent à leurs tables et à leurs cotés. C'est un cinéma conviviale qui nous transporte au sein de l'histoire.
Par ailleurs le cinéma de ce réalisateur n'est jamais avare de jolis cadres avec des angles de vues toujours pensés et millimétrés , de portes qui coulissent et s'ouvre sur un extérieur en contre jour. Et ici ils prennent un sens différents, un retour au manga dont l'histoire est issue. Certains plans autour d'un seul personnage, comme suzu récoltant les prunes, avec des dégradés de verts, ou plutôt un camaïeu, on est presque devant une peinture. C'est une beauté discrète qui sert l'histoire et qui vous touche en plein cœur.

Je n'ai pas envie de vous en dire trop sur l'histoire, j'ai envie que vous la découvriez comme nous, et que vous ayez envie comme moi d'avoir une place dans ce dortoir de filles. Mais je peux vous parler de certains thèmes qui seront abordés. Autour du père et de l'abandon de la famille, diverses réflexions se ramifient, comme trouver sa place et son identité quand on est la fille d'un second lit, et qu'une famille a implosé avec l'éclosion du couple de vos parents ( et ce spécialement dans la société japonaise), ou comment se créer par rapport à vos parents lorsque vous ne les avez quasiment pas connus. La mort est abordée sous un angle très différent que le deuil habituel, et finalement de manière tellement juste et inintéressante. C'est aussi une réflexion sur la vie, sur ce que l'on devrait être, comment on devrait être, et quel point d'équilibre nous devrions atteindre.
Je suis tombée amoureuse de ce casting. Je connaissais déjà Haruka Ayase depuis Real un film de Kiyoshi Kurosawa, qui à ce jour est celui que je préfère de ce réalisateur. Cette actrice est pleine de douceur, et respire la force. Son visage peut être traversé par toutes les émotions sans pour autant se départir d'une dose d'humanité. Suzu Hiroze, joue Suzu. Elle est extraordinaire, cette jeune femme dévore l'écran avec une aisance incroyable. Il est difficile pour certains acteurs de jouer à ses cotés. Là, elle est une petite sœur splendide et attachante. Masami Nagasawa, est la seconde de la fratrie, elle est drôle, elle arrive à donner de la légèreté dans le film, sans pour autant se départir d'une certaine dose de sérieux, et en sachant toujours faire poindre la fragilité derrière ce personnage. Kaho interprète la plus jeune des trois sœur Chika, elle arrive à interpréter toute la bienveillance et le coté décalé de cette femme qui a été élevée sans aucun de ses parents et qui fait avec.

Ce film a été un gros coup de cœur autant pour le key maker de ce blog que pour moi. Et si je vais lire les sept tomes déjà édité en français du manga. Le key maker espère qu'un peu à la manière de Linklater, Hirokazu Kore-eda reviendra filmer ses personnages dans dix ans pour voir leurs évolutions

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