l’Été de Kikujiro

by - juillet 10, 2018



L'ETE DE KIKUJIRO
de Takeshi Kitano

alors que les vacances d'été commencent à Tokyo, un enfant absolument craquant se prépare à les passer en solitaire. Il vit seul avec sa grand mère, son père a disparu du tableau et sa maman est à l'étranger. Où? On ne lui dit pas. Mais à l'heure où les autres partent en vacances, lui il reste seul dans une maison vide sa grand mère passant ses journées à travailler. Un jour, par hasard il tombe sur une adresse qui pourrait être celle de sa mère et décide de partir. Au bout de quelques mètres, il tombe sur une bande d'ado qui le rançonne, enfin qui essaient. Car apparaît une ancienne voisine du petit et son mari, elle reprend l'argent de l'enfant qui lui explique son projet. Elle missionne du coup son époux pour l'escorter jusqu'à cette ville à l'autre bout de l’île.

Ce film fait parti des films qui n'est jamais où le spectateur l'attend
On m'avait parlé d'un film plein d'émotions c'est ça, au moins en partie. Il est inclassable. Prenez dix critiques sur ce films aucune ne le classera dans la même catégorie. Mais si je peux vous donnez un conseil ne les lisez pas car la majorité s'aligne sur wikipédia et spolie dès la première phrase le dernier climax du film. Celui qui m'a personnellement laissée pantelante devant mon écran. Fin de la digression.
Ce film commence avec des tableaux d'anges probablement peints par le réalisateur qui a l'habitude de mélanger ses deux arts; et est chapitré comme un conte pour enfant, avec des formules enfantines. Mais il est un road movie, où chaque étape apprend quelque chose à l'enfant et ou à l'adulte qui l'accompagne. La proximité de l'eau et le fait que ce soit plus le voyage qui enrichisse les protagonistes que la destination, et qu'au final ils reviennent au point de départ ; rapproche à mon avis,
notre road movie d'une odyssée

Mais ceux qui voient dans cette œuvre une tragédie ou comédie, voire pour ceux qui sont plus créatif une tragicomédie me semblent aussi dans le vrai. Il y a un peu de chaque dans cette histoire et cela créé un tout complexe et touchant qui joue sur les déséquilibres et ne laisse jamais le spectateur dans une position confortable. Par exemple si takeshi kitano choisit de filmer l'océan de manière presque poétique il finira sa séquence en élargissant son plan jusqu'à faire apparaître le béton . S'ils sont pris en stop par un gentil couple, un chauffard en colère arrivera à les retrouver et à frapper «monsieur». Si l'enfant ne reste pas auprès de lui, si «monsieur» n'est pas assez vigilent il y a un pédophile qui rode. Il n'a pas de sentiments de sécurité dans cette oeuvre
Le personnage de monsieur est ambivalent,d'abord car l'homme qui est parti a évolué et est différent de celui qui revient. Ensuite car il est complexe, à la fois joueur, violent, manipulateur mais aussi généreux avec cet enfant, foncièrement humain, et toujours prêt à prendre un coup. On ne sait jamais qui il est: protecteur, personne qui ne sait pas quoi faire de sa peau, la présence d'un tatouage dorsal laisse penser au spectateur qu'il est proche d'un yakuza. La scène de la piscine, celle où il va voir sa mère, ou les quelques phrases qu'il échange avec son épouse laisse apparaître un homme qui manque d'étayage. Il devient le personnage imprévisible dans le film. Il n'est pas le seul, mais c'est lui qui donne le rythme.

Au rayon des personnages imprévisibles, ou difficilement lisibles, il y a la mère de l'enfant, est elle à l'étranger ou pas. Les personnages secondaires aussi sont tout ce qu'ils ne semblent pas être en général. Les responsables d'une fête foraine sont une mafia qui vous frappe si vous ne vous laissez pas arnaquer. Les motards aux looks patibulaires sont des crèmes serviables et généreux.... ils ne sont jamais ce que l'on peut projeter sur eux, lorsqu'on les rencontre.
Ce déséquilibre est partout provoquant parfois le rire. L'une des scènes du film expose une stratégie pour être pris en stop est à la fois inattendue au possible, et tellement drôle. C'est presque un gag à la Chaplin. Mais l'humour est un de mes gros bémol. Pas que ce soit mal fait. C'est toujours bien amené, bien pensé, avec des clin d’œil que je n'ai pas toujours bien compris, mais qui parlent à ceux qui ont une grande
culture de la carrière de Takeshi kitano. Mais je ne suis pas sensible à l'humour par l'humiliation, ou lorsque quelqu'un est mal traité. Ça me met profondément mal à l'aise. Et ce genre de situations parsèment le film cohabitant avec d'autres moments drôles et qui utilisent un humour plus classique. Au milieu de cela, il y a des moments de grandes émotions. Certains passages entre l'enfant et l'adulte sont bouleversants. Ce que met en place cet adulte pour cet enfant donne foi en l’être humain. Puis il y a les passages autour des mères qui sont très émouvants. Et on retombe sur un des paradoxes du film. Un film sur les mères, des mères que l'on cherche, qui vous laisse... et qui pourtant ne sont pas le propos du film. C'est un film sur les pères qui ne sont pourtant jamais présents dans cette histoire.

Mais le personnage de «monsieur» qui dans sa version originale est appelée «oncle», ressemble par plusieurs aspects au père du réalisateur, son prénom, sa proximité avec les yakuza, sont goût immodéré pour les jeux et la boisson...finalement il parle d'une figure paternelle que créé cet adulte face à cet enfant, imparfaite mais présente.
Les acteurs sont incroyables. Takeshi kitano est brillant,il se sert de son visage imperturbable pour composer un personnage énigmatique et chaleureux. Le petitou Yusuke Sekigushi est aussi mignon qu'expressif.il semble toujours juste et adulte. Il est bouleversant

Ce film n'est pas ce que j'imaginais,il n'est ni aussi beau, ni aussi mignon. Il est aigre-doux, il nous fait passer par une myriade de ressentiment en nous laissant une boule au ventre.

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