l’Été de Kikujiro
L'ETE DE KIKUJIRO
de Takeshi Kitano
alors
que les vacances d'été commencent à Tokyo, un enfant absolument
craquant se prépare à les passer en solitaire. Il vit seul avec sa
grand mère, son père a disparu du tableau et sa maman est à
l'étranger. Où? On ne lui dit pas. Mais à l'heure où les autres
partent en vacances, lui il reste seul dans une maison vide sa grand
mère passant ses journées à travailler. Un jour, par hasard il
tombe sur une adresse qui pourrait être celle de sa mère et décide
de partir. Au bout de quelques mètres, il tombe sur une bande d'ado
qui le rançonne, enfin qui essaient. Car apparaît une ancienne
voisine du petit et son mari, elle reprend l'argent de l'enfant qui
lui explique son projet. Elle missionne du coup son époux pour
l'escorter jusqu'à cette ville à l'autre bout de l’île.
Ce
film fait parti des films qui n'est jamais où le spectateur
l'attend.
On m'avait parlé d'un film plein d'émotions c'est ça, au moins en
partie. Il est inclassable. Prenez dix critiques sur ce films aucune
ne le classera dans la même catégorie. Mais si je peux vous donnez
un conseil ne les lisez pas car la majorité s'aligne sur wikipédia
et spolie dès la première phrase le dernier climax du film. Celui
qui m'a personnellement laissée pantelante devant mon écran. Fin de
la digression.
Ce
film commence avec des tableaux d'anges probablement peints par le
réalisateur qui a l'habitude de mélanger ses deux arts; et est
chapitré comme un conte pour enfant, avec des formules enfantines.
Mais il est un road movie, où chaque étape apprend quelque chose à
l'enfant et ou à l'adulte qui l'accompagne. La proximité de l'eau
et le fait que ce soit plus le voyage qui enrichisse les
protagonistes que la destination, et qu'au final ils reviennent au
point de départ ; rapproche à mon avis,
notre road movie
d'une odyssée. Mais ceux qui voient dans cette œuvre une tragédie ou comédie, voire pour ceux qui sont plus créatif une tragicomédie me semblent aussi dans le vrai. Il y a un peu de chaque dans cette histoire et cela créé un tout complexe et touchant qui joue sur les déséquilibres et ne laisse jamais le spectateur dans une position confortable. Par exemple si takeshi kitano choisit de filmer l'océan de manière presque poétique il finira sa séquence en élargissant son plan jusqu'à faire apparaître le béton . S'ils sont pris en stop par un gentil couple, un chauffard en colère arrivera à les retrouver et à frapper «monsieur». Si l'enfant ne reste pas auprès de lui, si «monsieur» n'est pas assez vigilent il y a un pédophile qui rode. Il n'a pas de sentiments de sécurité dans cette oeuvre
Le
personnage de monsieur est ambivalent,d'abord car l'homme qui est
parti a évolué et est différent de celui qui revient. Ensuite car
il est complexe, à la fois joueur, violent, manipulateur mais aussi
généreux avec cet enfant, foncièrement humain, et toujours prêt à
prendre un coup. On ne sait jamais qui il est: protecteur, personne
qui ne sait pas quoi faire de sa peau, la présence d'un tatouage
dorsal laisse penser au spectateur qu'il est proche d'un yakuza. La
scène de la piscine, celle où il va voir sa mère, ou les quelques
phrases qu'il échange avec son épouse laisse apparaître un homme
qui manque d'étayage. Il devient le personnage imprévisible dans le
film. Il n'est pas le seul, mais c'est lui qui donne le rythme.
Au
rayon des personnages imprévisibles, ou difficilement lisibles, il y
a la mère de l'enfant, est elle à l'étranger ou pas. Les
personnages secondaires aussi sont tout ce qu'ils ne semblent pas être en général. Les responsables d'une fête foraine sont une
mafia qui vous frappe si vous ne vous laissez pas arnaquer. Les
motards aux looks patibulaires sont des crèmes serviables et
généreux.... ils ne sont jamais ce que l'on peut projeter sur eux,
lorsqu'on les rencontre.
Ce
déséquilibre est partout provoquant parfois le rire. L'une des
scènes du film expose une stratégie pour être pris en stop
est à la fois inattendue au possible, et tellement drôle. C'est
presque un gag à la Chaplin. Mais l'humour est un de mes gros bémol.
Pas que ce soit mal fait. C'est toujours bien amené, bien pensé,
avec des clin d’œil que je n'ai pas toujours bien compris, mais
qui parlent à ceux qui ont une grande
culture de la carrière de
Takeshi kitano. Mais je ne suis pas sensible à l'humour par
l'humiliation, ou lorsque quelqu'un est mal traité. Ça me met
profondément mal à l'aise. Et ce genre de situations parsèment le
film cohabitant avec d'autres moments drôles et qui utilisent un
humour plus classique. Au milieu de cela, il y a des moments de
grandes émotions. Certains passages entre l'enfant et l'adulte sont
bouleversants. Ce que met en place cet adulte pour cet enfant donne
foi en l’être humain. Puis il y a les passages autour des mères
qui sont très émouvants. Et on retombe sur un des paradoxes du
film. Un film sur les mères, des mères que l'on cherche, qui vous
laisse... et qui pourtant ne sont pas le propos du film. C'est un
film sur les pères qui ne sont pourtant jamais présents dans cette
histoire. Mais le personnage de «monsieur» qui dans sa version originale est appelée «oncle», ressemble par plusieurs aspects au père du réalisateur, son prénom, sa proximité avec les yakuza, sont goût immodéré pour les jeux et la boisson...finalement il parle d'une figure paternelle que créé cet adulte face à cet enfant, imparfaite mais présente.
Les
acteurs sont incroyables. Takeshi kitano est brillant,il se sert de
son visage imperturbable pour composer un personnage énigmatique et
chaleureux. Le petitou Yusuke Sekigushi est aussi mignon
qu'expressif.il semble toujours juste et adulte. Il est bouleversant
Ce
film n'est pas ce que j'imaginais,il n'est ni aussi beau, ni aussi
mignon. Il est aigre-doux, il nous fait passer par une myriade de
ressentiment en nous laissant une boule au ventre.
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