LOFT
De Kiyoshi
Kurosawa
Loft
est l'un des huit films de Kiyoshi Kurosawa que nous avons eu le
bonheur de découvrir. Il est à mon avis l'un des plus riches sous
une forme poétique.
Reiko
est une écrivaine auréolée d'un succès, qui travaille sur son
second roman. Mais voilà elle est sujette à des malaises, parfois à
des hallucinations, et le plus inquiétant sont ses vomissements...
elle vomit de la boue. A bout de force, elle a envie de partir à la
campagne. Son éditeur, lui trouve une immense maison proche d'un lac
encore remplie des affaires de la précédente locataire. A peine
arrivée, elle apprend qu'une momie a été trouvée dans ce lac.
Cette femme est morte alors qu'elle faisait des soins dans cette boue
aux qualités cosmétiques reconnues.
L'une
des principales originalité de ce film est son implantation dans la
réalité. Ce réalisateur à l'habitude de situer ses histoires dans
des paysages urbains très cartésiens. Là l'univers est quasi
onirique. Il utilise ces grands espaces, cette foret dont on ne
connaît pas vraiment les limites, cet étendu d'eau, ces nappes de
brouillard pour créer une ambiance digne de celles des landes
anglaises. On s'attend à voir surgir n'importe quel animal
fantasmagorique, ou un spectre du brouillard.
Il
combine cela avec des bâtisses gigantesques. Celle ou habite Reiko,
dont on ne visite pas toutes les pièces, avec ces grands meubles
massifs et lourds, ces fenêtres immenses qui s'ouvrent sur cet
hangar mystérieux; ainsi que des portes que tout le monde peut
franchir. Puis le hangar non habité, et non habitable mais quand
même occupé, très inquiétant a quelques mètres de chez elle. Cet
aspect inquiétant est majoré quand on peut voir ce qu'il y a à
l'intérieur. Les pièces, leurs obscurités, les plafonds que l'on
ne perçoit pas tant ils sont hauts; cet endroit est le centre de
l'inquiétude au début, mais il n'est qu'un leurre comme toujours
dans ce film. Car rien n'est ce qu'il semble être.
C'est
aussi le cas d'Aya le fantôme et d'une momie.
Elles sont des éléments effrayants, mais il faut chercher plus
loin, pour en trouver la substantifique moelle. Par exemple Aya est
filmée de diverses manière, parfois comme une forme floue sur
laquelle on ne fait pas le point, mais le plus souvent, il y a qu'une
moitié d'elle, un hémisphère qui apparaît l'autre semblant être
caché par un arbre ou un mur. Elle attise notre curiosité. Et à
la fin lorsque la lumière est faite sur elle, sa manière d’être
incomplète nous parle encore de sa mort.Quant à la momie, elle est
floue. Jamais le réalisateur ne fait réellement le point.
D'ailleurs son visage n'a pas de traits. En tant que spectatrice je
me suis sentie incitée à réfléchir sur elle et sur ce qu'elle
pouvait représenter.
Kiyoshi
Kurosawa dans ce film installe une atmosphère sonore, en choisissant
de filmer avec une caméra DV qui capte tous les bruits, flippants.
Le bois craque, car il travaille ou parce qu’il y a quelqu'un dans
l'escalier? Le vent qui claque et qui fait bruisser les arbres. Le
son n'a jamais été autant utilisé dans ce que j'ai pu voir de lui.
Dans
les décors la maison,le hangar, ce lac qui ressemble de loin à un
monastère, cette boue source de la mort de la femme momifiée, mais
aimée et étudiée pour ses vertus esthétiques; rien n'est ce qu'il
à l'air d’être. Et pour moi les personnages autour de Reiko ne
sont pas ce que l'on croit.
[Alerte
spoilers]
Ma
vision de ce film est que chacune des choses effrayantes est un
aspect de Reiko. Aya est l'écrivaine. Elle est celle qui écrit son
deuxième roman, qui est confrontée a cet éditeur très ambigu et
qui sait se défendre crânement. Sa présence est toujours là pour
avertir Reiko . Pour lui permettre de survivre.
La
momie est un autre aspect de Reiko, celui de la recherche de la
perfection. D'ailleurs ses vomissements boueux s’arrête quand elle
la rencontre. Elle symbolise la femme amoureuse aussi. Makoto de qui
elle tombe amoureuse à une relation particulière avec cette momie,
une sorte d'emprise amoureuse passionnelle étrange. Comme celle
qu'il partage avec Reiko.
Car
les rôles masculins parlent aussi d'elle, des dangers qu'elle doit
affronter. Son éditeur qui tue ou essaie de tuer ses écrivaines
semblent nous parler de la volonté de rogner une créativité. Et le
risque d’être transformé en objet dépendant de lui.
Quant
à makoto, il est l'homme qui veut l'arracher à son art. Il incarne
un amour malsain qui l'oblige à renier qui elle est et à essayer de
trouver une perfection futile.
Ceci
n'est pas un film de fantômes. Il n'est pas là uniquement pour vous
faire peur. Il est un film sur ce qu'est être une femme, une artiste
dans le japon d'aujourd'hui. Il est aussi beau que fort.
2 commentaires
Pas convaincu. Un film qui ne sait pas dans quelle direction aller et surtout accumule les rebondissements tous plus douteux jusqu'au bout. Sans compter que l'actrice principale joue affreusement mal. Mais bon c'était toujours plus intéressant que le lamentable Secret de la chambre noire.
RépondreSupprimerPas mon préférée non plus, mais j'adore quand meme la façon qu'a Kurosawa de s'approprier l'espace et de rendre ça surnaturel.
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