2010 - 20192018CritiqueFrances McDormandLucas HedgesMartin McDonaghPeter DinklageSam RockwellWoody Harrelson
Three Billboards Outside Ebbing, Missouri
THREE BILLBOARDS
OUTSIDE EBBING, MISSOURI
de Martin McDonagh
je
suis probablement la seule qui à plusieurs kilomètres à la ronde,
n'a pas aimé Bons Baisers de Bruges,
film emblématique du réalisateur, avec
7 psychopathes,
qui m'a prouvé qu'une mauvaise bande annonce peut te couper toute
envie de voir un long métrage. A l'époque je ne bloguais pas et je
ne me suis jamais interrogée sur pourquoi ces sentiments? C'est la
proposition de Three billboards(...)qui m'a fait venir à lui.
Ceci
est une zone de spoilers. Même si j'essaie de les limiter, cette
critique en contient plusieurs.
Alors
qu'elle roule sur une route qui sent bon l’Amérique profonde, une
femme, s’arrête et fixe trois panneaux publicitaires laissés à
l'abandon. Elle va rencontrer la personne qui les gère, et le
spectateur découvre qui elle est: Mildred Hayes . Elle loue les
panneaux pour que soit affiché une mise en cause du shérif de la
ville et de l'efficacité de ses services. Ils n'ont pas su trouver
l'assassin de sa fille, violée pendant qu'elle agonisait, puis
brûlée.
Ce
film est d'abord une très bonne idée. L'idée de refaire prendre du
service à des panneaux publicitaires plus utilisés pour lancer le
récit, nous raconter à demi mots, ce qu'a vécu la fille de
Mildred, mais aussi pour nous parler de la ville à la marge de
laquelle elle vit. Une petite ville qui a été court-circuitée par
la construction d'une autoroute. Un endroit où tout le monde se
connaît. Un lieu ou chacun a une opinion sur son voisin. Martin
McDonagh qui est aussi à l'écriture en cinq minutes plante son
décor avec une efficacité assez rare. Il m'a emballée et m'a
happée directement. En plus il arrivera à transformer celui qui
affiche «shérif Willoughby» en plaque funéraire pour la fille de
Mildred et indirectement pour le shérif . Les voir unis dans cet
étrange lieu (c'est sous ce panneau que l'on a trouvé le corps de
la jeune fille) cela ajoute une dose de poésie.
Tout comme la place que prend l'homme de lois dans l'affichage de ces
panneaux.
Ce
film est très joliment filmé. Lors des premières minutes la caméra
se place sur le siège arrière de la voiture de la maman de la
victime alors qu'elle croise les panneaux; ce moment ou l'on est dans
l'obscurité et que la lumière, le pare brise s'ouvre sur la route
et sur les panneaux est d'une force incroyable. Majoré par le choix
de filmer en 2.35, nous avons vraiment l'impression de plonger dans
l'histoire physiquement. Le début du film est incroyablement fort.
Le choix de ce format enrichit ce long métrage et son propos très
régulièrement. La manière dont il l'utilise pour filmer en gros
plan son actrice ou pour créer une scène pleine de bonheur,
d'amour, et qui illustre parfaitement un moment suspendu dans le
temps autour de la famille Wiloughby est percutante.
Le
choix des acteurs est extraordinaire. Si Frances McDormand n'a rien a
prouvé tant elle est toujours juste et a même parfois sauvé les
films par sa présence en tant que second rôle. Là elle est
sublime. Elle incarne cette femme maltraitée par la vie,
combattante, âpre, et sans limite... elle ne faillit jamais dans son
interprétation, n'est jamais un cran en dessous. Elle n'a pas volé
sa nomination aux oscars, ni les prix qu'elle a déjà gagné.
Woody
Harrelson est le shérif Willoughby . Même constat sur son talent
que sa co-star. Mais lui a le délicat rôle d'incarner un homme
malade, en fin de vie, avec femme et jeunes enfants; stigmatisé
comme l'échec de son enquête... et d'apporter la dose d'humour
récurrente qui allège la situation. C'est une gageure, mais il y
arrive avec aisance, même au pire moment pour le personnage qu'il
incarne, il arrive à mettre l'humour que le scénario lui demande.
Sam Rockwell maintient le niveau qu'impose le tandem
Harrelson-Mcdorman. Son personnage est volatile. Mais il incarne
chacun des moments avec un talent égal, et une implication qui
apparaît à l'écran.
Dans
la foule des seconds rôles on retrouve Lucas Hedges et Peter Dinklage
qui sont attachants et bouffent l'écran quand ils apparaissent dans
une scène j'avoue que j'aurai voulu les voir plus présents dans ce
long métrage. de plus ils sont les vecteurs de notions d'humanité,
et de bienveillance qui manquent un peu à ce film.
Et
c'est le premier des points qui m'ont laissée perplexe .
J'ai
souvent lu que les personnages étaient recherchés, pas manichéens
et bien écrits. Je ne suis pas convaincue du tout. Ils sont en
effets pas manichéens. Et pour y arriver le scénario pousse le
curseur parfois trop loin. C'est parfois proche du cliché. Par
exemple l'ex mari, qui est bien sure un ex mari violent; qui
évidemment est un flic à la retraite; qui ça coule de source sort
avec une fille qui à quasiment l'age de ses enfants et qui est
idiote; et qui a envie de taper son ex quand il voit les panneaux....
et évidement la fille qui est en conflit avec sa mère à envie
d'aller vivre chez ce père qu'elle a vu taper sa mère et à priori
rabaisser son frère.
Ou
encore l'officier Dixon, qui au début du film est raciste,
homophobe, vivant avec sa mère, tabassant ceux qui s'opposent à
lui, a un problème avec l'alcool,et est un peu idiot. Une caricature
sur pattes et magie, une lettre très spéciale et il devient un
homme bien et bon. Pour moi ça tient plus à la magie du scenario
que de la construction du personnage. Sur une partie du récit , ces
raccourcis ne m'ont pas gênée, sur la totalité du film si. la
scène avec le fusil et le téléphone en fin de film m'agaçant
violemment.
Les
décors sont inégaux. Si les extérieurs sont somptueux . La manière
dont McDonnagh les filme est quasi onirique. Un moment contrairement
au personnage central on voit quasiment la présence de notre jeune
victime dans la peau d'une jeune biche. Moment touchant et plein de
poésie à l'image de celui au bord d'un lac avec le shérif et sa
famille. Mais des que l'on passe à l'intérieur des bâtiments, ça
devient moins beau. Il y a forcément une volonté d'exprimer quelque
chose. J'ai longuement réfléchit , mais je n'ai rien trouvé qui
pourrait amener quelque chose à ce récit. Mais peut-être est ce
moi.
Le
dernier point qui m'a laissé mi chèvre mi chou, est l'utilisation
de l'humour. Car si toute une première partie du film j'ai apprécié
cet humour, violent, décalé, noir, sur la durée du film je vous
avoue que ça ne me faisait plus rire du tout. Je n'en pouvais
plus,au moment ou Mildred est dans un restaurant à la fin du film,
j'en suis venue à ne plus apprécier notre héroïne. L'humour voire
le point «je t'ai tenu l'échelle», là pour faire rire et apporter
une adhésion ou créer un sentiment m'a juste donné l'envie de
regarder l'heure.
Ce
sentiment n'est pas du qu'à l'humour distillé dans ce film. Il y a
de nombreuses choses que je n'ai pas aimé.
La
première et la principale et le crescendo du film. La narration
m'avait séduite au début. Cet ancrage dans la réalité qui lui
donne un coté transposition de faits divers bien agréable. Le
réalisateur créé un faisceaux d'éléments qui nous font penser
que le coupable n'est pas loin. Ou que c'est un type de meurtre bien
précis. Puis le coté enquête passe au second plan, et c'est plus
qu'une histoire de colère, de tables renversées, de moments
d'intimidation, de n'importe quoi généralisé. Ça n'a même pas
une valeur cathartique. C'est du n'importe quoi, de plus en plus
gros, de moins en moins crédible.
La
mort du shérif est le moment où j'ai commencé à me désolidariser
du film. L'orchestration, ce qui en découle, rien n'est cohérent ni
dans l'histoire, ni nulles part. Après ce moment même si j'ai
apprécié le film, je n'ai jamais pu m'y accrocher. J'ai commencé à
voir venir les rebondissements et les méandres du scénario.
Le
coté Amérique profonde hyper stéréotypée m'a profondément
gênée. Le bon gars mourant, le flic clichés mais qui n'est jamais
arrêté, la mère au bout du rouleau qui a dit des choses horribles
à sa fille avant qu'elle meurt, le policier black qui vient pour
remettre des choses en ordre mais que personne ne veut aider, la
violence au quotidien très cathartique. Cette manière de dire chez
eux mais pas chez nous. Ces raccourcis me dérangent toujours
Je
n'ai pas un avis arrête sur ce film. Je ne vous dirai pas que je
l'ai aimé ou pas. Il faut le voir et se faire une opinion. Mais je
ne joindrai pas l'avis dithyrambique de la majorité des blogueurs ,
et ça ne veut pas dire que c'est moi qui est raison.
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