Enquête sur un Citoyen au-dessus de tout Soupçon
ENQUETE SUR UN
CITOYEN AU DESSUS DE TOUT SOUPCON
d'Elio Petri
lorsque
j'ai parlé autour de moi de «la prochaine fois je viserai le cœur»,
on m'a répondu «enquête sur un citoyen au dessus de tout soupçon".
Film qui m'attendait depuis plusieurs mois, et à qui je n'avais pas
eu le temps d'accorder assez d'importance.
Je
voudrais vous parler de mon ressenti des premières minutes du film.
J'aimerai vous décrire le sentiment quand la petite musique d'Enio
Moricone retentit. J'aimerai exprimer à quel point j'ai été
fascinée par la magnifique actrice. Le choc de la première phrase
prononcée après de longues minutes muettes, puis l'acte; puis la
mort. Mais je ne vous dirai rien de plus. Je souhaite que vous
éprouviez ces sentiments. Je ne dirai que le minimum. Ce que vous
lirez partout, uniquement ce que vous aurez besoin pour comprendre ce
dont on parle. L'homme tue la femme. Il efface toutes ses traces,
puis en fabrique d'autres. On découvre vite que cet homme, le jour
même, prend ses nouvelles fonctions. Il devient le chef de la
police judiciaire.
Le
réalisateur décide de faire une série de films qui esquisseraient
un portrait critique de la société ou il évolue. En effet en cette
fin des années 60 début des années 70, l'Italie
est gouvernée par la démocratie chrétienne depuis la fin de la
guerre. La justice est donnée par un groupe autonome, qui a des
positions contestées. Pendant les années dont on parle, les groupes
extrémistes de droite comme comme de gauche ont pris de l'ampleur,
les attentats ce sont multipliés dont certains fomentés par les
policiers pour avoir les coudées franches.
La
série que compose Elio Petri est composée d'un coin tranquille à
la campagne, le film dont on parle ici, la classe ouvrière va au
paradis, etla propriété c'est du vol.
pour
réaliser ce long métrage, le réalisateur se sert de certains des
codes du néoréalisme (un mouvement du cinéma italien qui a existé
du milieu de la seconde guerre mondiale, au milieu des années 50, il
s'oppose à un cinéma plus léger et plus insouciant). Entre autre
on préfère y raconter une situation plutôt que de mettre en scène
des longues explications; on favorise la mise en contexte dans la
société avant de se recentrer sur l'individu; le propos du film
est une critique de la société. Et ce fut si bien fait, qu’après
une projection test à d'autres cinéastes, on a conseillé à Pétri
de fuir l'Italie avant que le film sorte. Tant le risque d’être
arrêté voire assassiné était
réel.
Ce
film raconte comment cet homme est déchiré entre l'envie de se
faire prendre, pour être puni pour ce
crime.
Et tout faire pour ne pas l’être, se protégeant et
protégeant sa fonction de policier. Car il y a du Kafka dans cette
histoire. Et pas simplement par une phrase mise en exergue à la fin
du film. C'est aussi dans le déchirement quasi schizophrénique de
ce personnage. L'épilogue du de
cette histoire en est la quintessence.
Dans
cette volonté de faire de l'homme, l'incarnation de sa fonction, la
police se perd. Je ne veux pas en dévoiler trop. Mais le mécanisme
mis en place par le scénario est fascinant.
On
ne comprend pas tout de suite pourquoi cet homme a tué cette femme.
La réalisation met en place un système de flash-back qui nous
raconte l'histoire. Chaque flash-back nourrissant le questionnement,
pourquoi a-t-il fait ça. Qu'est-ce que la victime a blessé l'homme
ou la fonction? Quel ressort se déploie, pourquoi? Est ce qu'on le
sait vraiment à la fin du film, vu que l'homme est
perdu? Allons
même plus loin, est ce que cette femme n'avait pas la vision la plus
pertinente sur l'homme autant que sur sa fonction.
Il
est aussi bon de souligner que dans cette société très chrétienne,
si la femme est tuée c'est de sa faute parce que libre et
divorcée... pensez, c’était une femme qui ne portait pas de sous
vêtements. Tout comme lorsqu'il faut trouver un bouc émissaire, il
faut que ce soit un étudiant «gauchiste». Et avec quelques
«techniques», combien des personnes expérimentées peuvent faire
avouer tout est n'importe quoi. Il est jubilatoire de voir cette
machinerie se retourner contre son habituel exécutant; de voir le
mécanisme s'inverser, de voir une faille et
prouver combien il est facile de s'engouffrer dedans. Le
scénario écrit par Petri et Ugo Pirro est un exercice d'orfèvre.
Pas un moment il ne verse dans la facilité.
La
réalisation est à la hauteur. C'est beau. La construction de
l'image est sublime. Renforçant le coté kafkaïen de l'un, le coté
vaporeux et léger de l'autre, ou le coté crasseux et embourbé de
l'institution.
Les
acteurs déroulent leurs talents Gian Maria Volonte porte le film et
incarne tous les états qu'il traverse sans se départir de mystère.
Même quand il est au plus bas, il reste charismatique. Il arrive à
jamais n’être en sur jeu
Florinda Bolkan est bellissime autant qu'elle est talentueuse. Elle joue
toutes les facettes de cette femme avec une aisance qui sert son
rôle.
quant à la musique d'enio moricone, je ne saurai vous conseiller que d'aller rapidement l'écouter
Ce
film est sublime, et il est à voir des que l'on en a l'occasion
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