Enquête sur un Citoyen au-dessus de tout Soupçon

by - janvier 29, 2018



ENQUETE SUR UN CITOYEN AU DESSUS DE TOUT SOUPCON
d'Elio Petri

lorsque j'ai parlé autour de moi de «la prochaine fois je viserai le cœur», on m'a répondu «enquête sur un citoyen au dessus de tout soupçon". Film qui m'attendait depuis plusieurs mois, et à qui je n'avais pas eu le temps d'accorder assez d'importance.

Je voudrais vous parler de mon ressenti des premières minutes du film. J'aimerai vous décrire le sentiment quand la petite musique d'Enio Moricone retentit. J'aimerai exprimer à quel point j'ai été fascinée par la magnifique actrice. Le choc de la première phrase prononcée après de longues minutes muettes, puis l'acte; puis la mort. Mais je ne vous dirai rien de plus. Je souhaite que vous éprouviez ces sentiments. Je ne dirai que le minimum. Ce que vous lirez partout, uniquement ce que vous aurez besoin pour comprendre ce dont on parle. L'homme tue la femme. Il efface toutes ses traces, puis en fabrique d'autres. On découvre vite que cet homme, le jour même, prend ses nouvelles fonctions. Il devient le chef de la police judiciaire.
Le réalisateur décide de faire une série de films qui esquisseraient un portrait critique de la société ou il évolue. En effet en cette fin des années 60 début des années 70, l'Italie est gouvernée par la démocratie chrétienne depuis la fin de la guerre. La justice est donnée par un groupe autonome, qui a des positions contestées. Pendant les années dont on parle, les groupes extrémistes de droite comme comme de gauche ont pris de l'ampleur, les attentats ce sont multipliés dont certains fomentés par les policiers pour avoir les coudées franches.
La série que compose Elio Petri est composée d'un coin tranquille à la campagne, le film dont on parle ici, la classe ouvrière va au paradis, etla propriété c'est du vol.
pour réaliser ce long métrage, le réalisateur se sert de certains des codes du néoréalisme (un mouvement du cinéma italien qui a existé du milieu de la seconde guerre mondiale, au milieu des années 50, il s'oppose à un cinéma plus léger et plus insouciant). Entre autre on préfère y raconter une situation plutôt que de mettre en scène des longues explications; on favorise la mise en contexte dans la société avant de se recentrer sur l'individu; le propos du film est une critique de la société. Et ce fut si bien fait, qu’après une projection test à d'autres cinéastes, on a conseillé à Pétri de fuir l'Italie avant que le film sorte. Tant le risque d’être arrêté voire assassiné était réel.
Ce film raconte comment cet homme est déchiré entre l'envie de se faire prendre, pour être puni pour ce
crime. Et tout faire pour ne pas l’être, se protégeant et protégeant sa fonction de policier. Car il y a du Kafka dans cette histoire. Et pas simplement par une phrase mise en exergue à la fin du film. C'est aussi dans le déchirement quasi schizophrénique de ce personnage. L'épilogue du de cette histoire en est la quintessence.
Dans cette volonté de faire de l'homme, l'incarnation de sa fonction, la police se perd. Je ne veux pas en dévoiler trop. Mais le mécanisme mis en place par le scénario est fascinant.
On ne comprend pas tout de suite pourquoi cet homme a tué cette femme. La réalisation met en place un système de flash-back qui nous raconte l'histoire. Chaque flash-back nourrissant le questionnement, pourquoi a-t-il fait ça. Qu'est-ce que la victime a blessé l'homme ou la fonction? Quel ressort se déploie, pourquoi? Est ce qu'on le sait vraiment à la fin du film, vu que l'homme est
perdu? Allons même plus loin, est ce que cette femme n'avait pas la vision la plus pertinente sur l'homme autant que sur sa fonction.
Il est aussi bon de souligner que dans cette société très chrétienne, si la femme est tuée c'est de sa faute parce que libre et divorcée... pensez, c’était une femme qui ne portait pas de sous vêtements. Tout comme lorsqu'il faut trouver un bouc émissaire, il faut que ce soit un étudiant «gauchiste». Et avec quelques «techniques», combien des personnes expérimentées peuvent faire avouer tout est n'importe quoi. Il est jubilatoire de voir cette machinerie se retourner contre son habituel exécutant; de voir le mécanisme s'inverser, de voir une faille et prouver combien il est facile de s'engouffrer dedans. Le scénario écrit par Petri et Ugo Pirro est un exercice d'orfèvre. Pas un moment il ne verse dans la facilité.
La réalisation est à la hauteur. C'est beau. La construction de l'image est sublime. Renforçant le coté kafkaïen de l'un, le coté vaporeux et léger de l'autre, ou le coté crasseux et embourbé de l'institution.
Les acteurs déroulent leurs talents Gian Maria Volonte porte le film et incarne tous les états qu'il traverse sans se départir de mystère. Même quand il est au plus bas, il reste charismatique. Il arrive à jamais n’être en sur jeu
Florinda Bolkan est bellissime autant qu'elle est talentueuse. Elle joue toutes les facettes de cette femme avec une aisance qui sert son rôle.
quant à la musique d'enio moricone, je ne saurai vous conseiller que d'aller rapidement l'écouter

Ce film est sublime, et il est à voir des que l'on en a l'occasion


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