Matrix

by - novembre 07, 2016


Programmeur anonyme dans un service administratif le jour, Thomas Anderson devient Neo la nuit venue. Sous ce pseudonyme, il est l'un des pirates les plus recherchés du cyber-espace. A cheval entre deux mondes, Neo est assailli par d'étranges songes et des messages cryptés provenant d'un certain Morpheus. Celui-ci l'exhorte à aller au-delà des apparences et à trouver la réponse à la question qui hante constamment ses pensées : qu'est-ce que la Matrice ? Nul ne le sait, et aucun homme n'est encore parvenu à en percer les défenses. Mais Morpheus est persuadé que Neo est l'Elu, le libérateur mythique de l'humanité annoncé selon la prophétie. Ensemble, ils se lancent dans une lutte sans retour contre la Matrice et ses terribles agents...
Matrix – 23 Juin 1999 – Réalisé par Lana et Lily Wachowski

Alors que cela fait près de six ans que je vis sur Bordeaux, je n'ai pas encore fait le tour de cette ville magnifique. Je découvre ainsi régulièrement des nouveaux lieux, comme l'ancienne base sous-marine qui est depuis quelques années un espace culturel ouvert aux expositions et autres activités en tout genre. J'ai découvert le film « Ellis » de JR dans ce lieu et depuis peu l'exposition « La Probabilité du Miracle » créée par le photographe Gérard Rancinan et l'écrivaine Caroline Gaudriault. Ces deux personnes ce sont associés pour créer une expérience assez troublante, ou l'on se perd dans les espaces de la base, entre photographies et écritures, extraits audio et vidéo ou on interroge notre propre rapport au réel, un « parcours » initiatique un brin « pompeux » mais clairement déstabilisant que le lieu amplifie !

Chacun vivra cela différemment, mais moi cela m'a fait penser à ma récente découverte de Matrix au cinéma. On y trouve une thématique commune (l'interrogation vis a vis du réel) et un lieu d'exception, une chapelle pour beaucoup, le cinéma. Et si l'on ouvre suffisamment son esprit, il en faudra peut pour que vous perdiez pied et que vous suiviez le lapin blanc dans le terrier. L'œuvre des Wachowski prend pour moi une ampleur différente et hautement plus terre à terre, un sentiment que je vais essayer de vous faire part.



Thomas Anderson est un anonyme parmi tant d'autre. Le jour il travaille comme programmeur dans une obscure petite boite d'informatique et le soir, quand la nuit tombe et que les barrières morales s'estompent, il devient Néo, un pirate informatique extrêmement doué. Une vie entre deux univers qui lui convient à merveille jusqu'au jour ou il est contacté par une mystérieuse correspondante sur son ordinateur, stupéfait et dans le flou, il suit la piste qui s'ouvre à lui. Il découvre ainsi le visage de Trinity qui le met en garde sur un danger qui le guette et qu'elle sait pourquoi il est venu. Il cherche à savoir ce qu'est la Matrice. Le lendemain, alors qu'il est à son travail, Morpheus le contacte et lui donne des consignes si il veut échapper aux agents venu le chercher, hélas il se fera capturer. Interroger, voire malmener par un inquiétant agent Smith, il ne dira pourtant aucun mot sur ses contacts récents avec Morpheus. Le premier acte de foi qui l'amèneront de l'autre coté du miroir, ou le programmeur laissera sa place à « Neo », celui qui est « l’Élu ».

Si je n'ai pas revu Matrix Reloaded et Revolutions depuis presque dix ans et que je l'ai presque complètement oublié ; la «découverte » au cinéma de « Matrix » n'a fait que confirmer ce que je pensais de ce film. C'est une œuvre phénoménale ou rien n'est superflu et rare sont les films qui peuvent se targuer de cela. Surtout que les sœurs Wachowski ne manquent pas de générosité, car entre les films d'animations tels Ghost in The Shell ou Akira, ceux de kung-fu, de John Woo, de James Cameron ou encore l'influence de la littérature et des jeux vidéos, il y a de quoi faire et c'est avec grand talent qu'elles synthétisent le tout pour créer leur monde à eux « La Matrice » …

D'un point de vue scénaristique, c'est très solide ! Visionnaire pour son époque, totalement dans l'air du temps de nos jours, le monde virtuel à clairement parasité notre rapport à l'image, celle que l'on a de nous et celle que l'on renvoi. « La Matrice » devient ainsi le reflet de notre société capitaliste, ou l'on est mis face à un choix limpide, se laisser totalement contrôler par des machines ou alors prendre notre destin en main pour s'en affranchir ! Néo est ainsi l'élément déclencheur qui va éveiller les consciences. Une dualité entre ce qui est vrai et ce qui ne l'est pas que l'on nous rappelle constamment, par des répliques nous intiment de choisir le bon coté, de passer de l'autre coté du miroir, ou alors en citant Lewis Carroll et Liman Frank Baum qui sont des invitations au voyage. Les actes de Thomas Anderson comme suivre ou non l'invitation de Trinity, la pilule bleu ou rouge, son entraînement avec Morpheus, le sauvetage ou encore son combat avec l'agent Smith sont les étapes fondatrices de celui qui deviendra l'Elu !

Quant à la forme, c'est un délice à tous les étages ! Tout est au service de l'histoire. La direction artistique brille par sa limpidité et par son imagination, elle se ressert avec brio par exemple d'une partie des décors de « Dark City » d'Alex Proyas pour la séquence d'ouverture et le Nebuchadnezzar est un mix entre un tas de boue et un vaisseau spatial qui marque cette méfiance envers les machines. Un environnement ou la réalisation des Wachowski fait merveille, que cela soit dans des décors du monde « réel » ou dans ceux de la « matrice », elles gèrent les scènes d'actions ou d'expositions avec une inventivité de tous les instants. Une séance d’entraînement aux arts martiaux devient l'occasion de faire un clin d’œil au film « Le Jeu de la Mort » avec Bruce Lee, ou encore de faire de la première confrontation avec l'Agent Smith, un climax ébouriffant entre western et Kung-fu. L'ensemble est évidemment bien découpé, chorégraphié par un modeste homme que l'on appelle Yuen Woo-Ping et photographier par un chef op de talent, l'excellent Bill Pope. A cela on peut rajouter une excellente bande originale signé Don Davis et des acteurs qui sont aussi bons que totalement investis dans le rôle, à ce jour pour moi l'un des meilleurs rôles de Keanu Reeves.

Pour finir, je pense que « Matrix » est bien plus qu'un simple film de science-fiction ou l'on est proche de la perfection, mais bien une invitation à la différence, qui concerne aussi bien les réalisatrices que nous simple spectateurs. « La Matrice » est l'incarnation même de ce qui peut nous empêcher de vivre, qui nous bloque dans notre vie ou qui décide de ce que l'on va mettre ou aimer. Une ligne invisible que l'on connaît tous, mais qui ici peut être franchit, ce que les sœurs Wachowski ont fait et qui avec leur film nous encourage à passer au delà des apparences, a se méfier de ce qui est présenté comme le « réel ». Cette norme si étouffante que l'on a chacun contribuer à alimenter et que l'on peut briser, bousculer ou encore renverser, en devenant une autre personne, celle que l'on est vraiment et non plus une image de ce que l'on croit être, bref à devenir le « Néo » de notre propre existence. Une récurrence dans la filmographie des Wachowski. Et cette volonté de bousculer l’individu de le pousser à passer de l'autre coté du miroir, je l'ai retrouvé aussi dans l'exposition de Gerard Rancinan et Caroline Gaudriault, avec certes des moyens différents, mais avec tout autant d'imaginations …

"Matrix poster de Kilian Eng"

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4 commentaires

  1. Clairement le film le plus passionnant des trois (les deux autres ne se raccrochant à celui-ci qu'après son succès). Je l'ai découvert en salle à sa sortie, et je dois dire qu'il m'avait bien bluffé. Depuis, on ne peut que constater qu'il y aura eu un avant et un après "Matrix" (et pourtant, tout ou presque n'est que recyclage dans le film), autant pour la SF que pour les Wachowski qui ont à leur tour avalé la pilule avant de passer de l'autre côté.

    Bravo pour cet article.

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    1. Je l'ai clairement redécouvert sur le coup. Quant aux suites, je ne m'y suis pas encore replongé ...
      Merci pour le compliment.

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  2. Le seul à valoir le coup de la trilogie. Le dyptique qui suivra sera peut être correct visuellement (mais a je trouve bien plus vieilli que Matrix), mais s'enfoncera dans toutes les directions sans avoir une direction claire. Là où ce premier Matrix est plus terre à terre et bien plus clair. On ne reviendra pas sur les dix mille références du film (ce serait faire redite), mais les Wachowski réussissent à se jouer de leur référence pour créer leur propre univers et c'est cohérent. La réalisation est bonne, ça joue bien et la mythologie de qualité (le personnage de Néo ne croit jamais qu'il est l'élu et c'est encore le cas à la fin, et pourtant il est l'unique choix pour sauver le monde).

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    1. Je serais presque d'accord avec toi, mais comme je n'ai pas revu les deux autres ...
      Concernant Matrix c'est vraiment devenu un classique.

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