Kiki's Delivery Service
KIKI'S DELIVERY
SERVICE
de Hayao Miyazaki
"Kiki's
delivery service" ou "Kiki la petite sorcière" en français est l'un de
ses dessins animés les plus sous estimée de l'oeuvre de l'artiste
et de la production des studio Ghibli.
Kiki
a treize ans. Et a treize ans une petite sorcière comme elle doit
partir de chez elle, choisir une autre ville, s'y installer, y vivre
un an, et ce n'est qu'après ces trois cent soixante cinq jours
qu'elle peut rendre visite à ses parents. Un jour elle entend qu'il
ne fera pas de vent la nuit suivante, et elle décide de partir de
chez elle. Ses parents ne sont absolument pas prêts, mais ils la
laisse enfourcher son balai et partir.
Ce
film se situe dans une Europe rêvée, aux accents florentins et de renaissance. Il est difficile de situer la période, certains
évoquent une fourchette entre 1930 et 1960. mais tout cela n'a pas
d'importance. Car cette histoire est universelle.
Il
y a beaucoup de Japon dans ce conte en lui même. D'ailleurs les
livres dont est issue cette petite sorcière sont japonais. Ils sont
au nombre de quatre, destinés aux enfants, et sont écrits par
l'autrice Eiko Kadono qui aujourd'hui flirte avec les quatre vingt
dix ans.
Il
y a beaucoup d'accents européens dans cette animation.
L'architecture, les costumes, la nourriture, et un certaine manière d’être, la relation aux aînées par exemple.
Et
il y a tout le reste qui nous parle de nous. Ce film d'animation est
un conte qui raconte un voyage initiatique. Et la particularité de cette histoire est qu'elle brise les
codes. D'abord c'est le voyage d'une petite fille, et c'est
normalement les hommes ou les petits garçons qui sont les
personnages de ce genre d'histoire. Ensuite il n'est pas question de
vengeance, et la quête de cette jeune fille prend les traits d'un
rituel de sorcière. Ce qu'elle cherche, c'est qui elle est et
où est sa place?
En
redécouvrant qui elle est, en se construisant aussi, apparaît un
portrait bien différent des autres jeunes filles de son age, voire
différent de tout ce qui pourrait ressembler à des schémas
sociétaux. C'est elle qui vient en aide au garçon qui gagne son
cœur, c'est elle qui est en position de le sauver. Une foule de
petites choses qui parlent de son auteur.
Myazaki tout comme un autre de mes cinéastes préféré Ocelot ont
une vraie conscience de la place des femmes dans la société, et
combien ça peut être difficile d’être une fille. Et leurs héroïnes sont inspirantes, et il est aisé de s'y reconnaître. Si j'étais la
maman d'une petite fille, je lui ferai voir en boucle leurs films
d'animation pour qu'elle ne perde jamais confiance en elle.
Si
vous avez été une fille de treize ans, vous avez été kiki. Soit
vous n'avez pas pris votre balai, et volé loin de vos parents. Mais
peu à peu, ce dont on vous parle depuis que vous êtes une petite
fille, et qui est dans l'air depuis quelques temps s'impose à vous.
Vous devenez une femme. Ce n'est pas seulement un rendez-vous
mensuel, c'est un tout. C'est à la fois excitant et le début de
grands moments de solitudes. Les gens ne vous voient plus pareil,
votre corps n'est plus le même, ce que vous ressentez est différent.
Votre assurance, votre manière de vous habiller (personnellement je
suis passée du rose au noir aussi vite que kiki), les codes; tout a
changé. Et plus que jamais on cherche des repères autour de nous. Et
c'est pour cela que je trouve tellement bien pensé les personnages
qui entourent kiki. Des femmes majoritairement de tous ages, capables
de l'éclairer.
D'abord une autre jeune sorcière un peu trop sure
d'elle, un peu trop poseuse, mais qui lui donnera une clé pour son
avenir.
Asano,
la douce future maman, qui est une représentation de la mère
nourricière. Celle à qui on n'a pas besoin de parler pour qu'elle
vous comprenne.
La
vieille dame et sa dame de compagnie qui sont ces femmes chaleureuses
et attentionnées que l'on croise et qui vous réchauffent le cœur.
Ce sont des amies tout comme cette jeune artiste, un peu plus vieille
que kiki mais pas très âgée non plus. Qui dans un domaine
différent, traverse les mêmes questionnements qu'elle, les mêmes pertes de confiance, les mêmes aboutissements.
Puis
celles que l'on voit qui ne nous ressemble pas, que l'on juge sans
forcément les connaître, celle à qui on voudrait ressembler mais
qui sont un but inaccessible à atteindre.
Ce
film nous rappelle que en tant que femme on devrait être solidaire et
bienveillante en dépeignant un univers si éloigné du notre et qui pourtant est un reflet juste de notre société.
Quant
aux dessins en eux même, c'est un
enchantement. Cette
animation traditionnelle me ramène directement à mon enfance et au sherlock holmes du maestro que je regardais enfant. Ses couleurs me
rappellent les feutres de mon enfance, et sa composition les tableaux
que je ne me lasse pas de découvrir aujourd'hui.
Puis
il y a le petit animal de chez Miyazaki, ici Jiji le chat noir de la
sorcière. Il est craquant, il apporte souvent l'humour dans le
récit, mais aussi il est le contre-champs de ce que ressent Kiki. Il
est sa petite voix. Je ne peux pas ne pas parler du générique
parfait de ce film. Miyazaki sait nous quitter en attisant l'émotion
que provoque son œuvre.
Ce
film d'animation est lumineux et plein d'espoir dans sa forme comme
sur le fond.
On
dit qu'Akira Kurosawa a pleuré en voyant ce film.... moi aussi
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