Kiki's Delivery Service

by - janvier 26, 2019



KIKI'S DELIVERY SERVICE
de Hayao Miyazaki

"Kiki's delivery service" ou "Kiki la petite sorcière" en français est l'un de ses dessins animés les plus sous estimée de l'oeuvre de l'artiste et de la production des studio Ghibli.

Kiki a treize ans. Et a treize ans une petite sorcière comme elle doit partir de chez elle, choisir une autre ville, s'y installer, y vivre un an, et ce n'est qu'après ces trois cent soixante cinq jours qu'elle peut rendre visite à ses parents. Un jour elle entend qu'il ne fera pas de vent la nuit suivante, et elle décide de partir de chez elle. Ses parents ne sont absolument pas prêts, mais ils la laisse enfourcher son balai et partir.

Ce film se situe dans une Europe rêvée, aux accents florentins et de renaissance. Il est difficile de situer la période, certains évoquent une fourchette entre 1930 et 1960. mais tout cela n'a pas d'importance. Car cette histoire est universelle.
Il y a beaucoup de Japon dans ce conte en lui même. D'ailleurs les livres dont est issue cette petite sorcière sont japonais. Ils sont au nombre de quatre, destinés aux enfants, et sont écrits par l'autrice Eiko Kadono qui aujourd'hui flirte avec les quatre vingt dix ans.
Il y a beaucoup d'accents européens dans cette animation. L'architecture, les costumes, la nourriture, et un certaine manière d’être, la relation aux aînées par exemple.
Et il y a tout le reste qui nous parle de nous. Ce film d'animation est un conte qui raconte un voyage initiatique. Et la particularité de cette histoire est qu'elle brise les codes. D'abord c'est le voyage d'une petite fille, et c'est normalement les hommes ou les petits garçons qui sont les personnages de ce genre d'histoire. Ensuite il n'est pas question de vengeance, et la quête de cette jeune fille prend les traits d'un rituel de sorcière. Ce qu'elle cherche, c'est qui elle est et où est sa place?
En redécouvrant qui elle est, en se construisant aussi, apparaît un portrait bien différent des autres jeunes filles de son age, voire différent de tout ce qui pourrait ressembler à des schémas sociétaux. C'est elle qui vient en aide au garçon qui gagne son cœur, c'est elle qui est en position de le sauver. Une foule de petites choses qui parlent de son auteur.

Myazaki tout comme un autre de mes cinéastes préféré Ocelot ont une vraie conscience de la place des femmes dans la société, et combien ça peut être difficile d’être une fille. Et leurs héroïnes sont inspirantes, et il est aisé de s'y reconnaître. Si j'étais la maman d'une petite fille, je lui ferai voir en boucle leurs films d'animation pour qu'elle ne perde jamais confiance en elle.

Si vous avez été une fille de treize ans, vous avez été kiki. Soit vous n'avez pas pris votre balai, et volé loin de vos parents. Mais peu à peu, ce dont on vous parle depuis que vous êtes une petite fille, et qui est dans l'air depuis quelques temps s'impose à vous. Vous devenez une femme. Ce n'est pas seulement un rendez-vous mensuel, c'est un tout. C'est à la fois excitant et le début de grands moments de solitudes. Les gens ne vous voient plus pareil, votre corps n'est plus le même, ce que vous ressentez est différent. Votre assurance, votre manière de vous habiller (personnellement je suis passée du rose au noir aussi vite que kiki), les codes; tout a changé. Et plus que jamais on cherche des repères autour de nous. Et c'est pour cela que je trouve tellement bien pensé les personnages qui entourent kiki. Des femmes majoritairement de tous ages, capables de l'éclairer. 

D'abord une autre jeune sorcière un peu trop sure d'elle, un peu trop poseuse, mais qui lui donnera une clé pour son avenir.
Asano, la douce future maman, qui est une représentation de la mère nourricière. Celle à qui on n'a pas besoin de parler pour qu'elle vous comprenne.
La vieille dame et sa dame de compagnie qui sont ces femmes chaleureuses et attentionnées que l'on croise et qui vous réchauffent le cœur. Ce sont des amies tout comme cette jeune artiste, un peu plus vieille que kiki mais pas très âgée non plus. Qui dans un domaine différent, traverse les mêmes questionnements qu'elle, les mêmes pertes de confiance, les mêmes aboutissements.
Puis celles que l'on voit qui ne nous ressemble pas, que l'on juge sans forcément les connaître, celle à qui on voudrait ressembler mais qui sont un but inaccessible à atteindre.
Ce film nous rappelle que en tant que femme on devrait être solidaire et bienveillante en dépeignant un univers si éloigné du notre et qui  pourtant est un reflet juste de notre société.

Quant aux dessins en eux même, c'est un enchantement. Cette animation traditionnelle me ramène directement à mon enfance et au sherlock holmes du maestro que je regardais enfant. Ses couleurs me rappellent les feutres de mon enfance, et sa composition les tableaux que je ne me lasse pas de découvrir aujourd'hui.
Puis il y a le petit animal de chez Miyazaki, ici Jiji le chat noir de la sorcière. Il est craquant, il apporte souvent l'humour dans le récit, mais aussi il est le contre-champs de ce que ressent Kiki. Il est sa petite voix. Je ne peux pas ne pas parler du générique parfait de ce film. Miyazaki sait nous quitter en attisant l'émotion que provoque son œuvre.
Ce film d'animation est lumineux et plein d'espoir dans sa forme comme sur le fond.

On dit qu'Akira Kurosawa a pleuré en voyant ce film.... moi aussi

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