Les Trois Jours du Condor

by - octobre 11, 2016


Joseph Turner est un agent de la CIA chargé de réunir un maximum d'informations dans les livres d'espionnage afin d'en glaner des idées et de trouver les fuites quant aux pratiques de l'agence de renseignements. Sa vie va changer lorsqu'il retrouvera tous ses collègues assassinés pendant la pause-déjeuner. Turner, sous le pseudonyme de Condor va, dès lors, se lancer dans une course contre-la-montre dans le but de mettre au jour un réseau d'espions infiltré au cœur même de l'agence.

Les Trois Jours du Condor – 24 Septembre 1975 – Réalisé par Sydney Pollack


Richard M. Nixon était le 37ème président des États-Unis d'Amérique. Elu en 1968, il se représente en 1972 où il est réélu largement avec près de 60% des voix. Mais voilà juste après sa réélection, « Le scandale du Watergate » refait surface. Cette affaire avait été révélée à l'origine par deux journalistes du Washington Post; Carl Bernstein et Bob Woodward. Tous les deux ont démontré que le cambriolage des locaux du parti-démocrate était bien plus que cela, qu'il s'agissait d'une affaire d'espionnage et que tout remontait jusqu'à la Maison Blanche. Hélas et malgré l'immense travail qu'ils ont abattus, l'affaire ne fit pas de bruit et n’empêcha pas Nixon d’être réélu. Sauf que des 1973 tout va s’accélérer avec le procès des cambrioleurs du « Watergate », puis avec la mise en œuvre d'une enquête parlementaire concernant des irrégularités de financement chez les républicains pendant la campagne de 72. A partir d'ici, les masques tombent, les responsables se dénoncent et parlent et l'étau autour du cou de Nixon se resserre un peu plus chaque jour. Au pied du mur, isolé politiquement et sous le coup d'une procédure d’impeachment, il démissionne en 1974.

Ceci est une affaire qui marquera le peuple américain durablement et qui les verra avoir moins confiance en l’exécutif, renforçant au passage ce que l'on nomme « le quatrième pouvoir » notamment grâce au duo de journaliste du Washington Post. Et c'est avant tout le cinéma qui prendra le sujet à bras le corps, qui mettra en image le traumatisme de cette époque, avec des cinéastes comme Alan J.Pakula qui signe « Les Hommes du Président » et « A cause d'un assassinat », Francis Ford Coppola avec « Conversation Secrète » ou encore Sydney Pollack avec « Les Trois Jours du Condor » porté par Robert Redford !!!

Joseph Turner est un brillant analyste de la C.I.A. Celui que l'on appelle le « Condor » fait partie d'une officine clandestine à New-York qui se charge d'analyser tous les écrits qui sortent pour savoir si il y a eu des fuites dans les méthodes de l'Agence. Lors d'un jour ordinaire parmi tant d'autre, Turner part acheter a midi le repas pour ses camarades et lui, mais à son retour il découvre un carnage. Pendant qu'il était absent, une équipe de tueurs s'est introduit dans les locaux de la ou il travaille et ils ont abattu toutes les personnes présentes, hélas sans se douter qu'il en manquait un. Complètement déboussolé et aux abois, il quitte les lieux de la tuerie. Il contacte rapidement son responsable pour avoir les directives à suivre. Sauf que tout semble étrange et cela ne manque pas, car quand il s’apprête a retrouver un collègue qui doit l'extraire de son bourbier, on tentera de tuer. A partir de là, s'engagera un jeu de dupes donc l'issue est incertaine …

Ce film brillant, on le doit à Sydney Pollack, mais aussi au talent de James Grady, auteur et ancien journaliste d'investigation. Son roman « Les Six jours du Condor » est sortie la même année que le départ de Nixon de la présidence, ou l'affaire du Watergate à clairement influences l'écriture de Grady; une chose que les scénaristes du film ont accentué pour en faire un pur film politique ! Inscrivant ainsi son long métrage dans une veine de film engagé que l'époque a inspirer.

Dès le début, on est intrigué par le ton résolument normal que le film emploi ! Turner (Robert Redford) hormis son travail d'agent, c'est un homme banal très loin du cliché que l'on peut se faire habituellement des agents de la C.I.A au cinéma. Un aspect essentiel pour lancer l'intrigue que le réalisateur amène avec beaucoup d'intelligence. Que cela soit dans le look, le moyen de transport, son activité ou encore par ce rythme très calme, l'introduction ancre son histoire dans un monde tangible et très terre à terre. Une qualité qui fait sens dans le monde post Watergate que l'on nous présente. Et quand Sydney Pollack nous entraîne de l'autre coté, tout change ! Que cela soit le ton, les personnages ou l'échelle à laquelle se déroule le film, on se retrouve tout aussi mal à l'aise que le « Condor » qui doit se terrer dans un petit appartement pour échapper aux yeux de la grande ville qui le scrute et ou chaque passant est un danger potentiel. Le réalisateur maîtrise son rythme, ainsi que son récit à la perfection, ou peu à peu la musique se fait rare et les silences nombreux pour mieux laisser la paranoïa envahir l'écran, nous attraper et nous étouffer; comme lorsque Turner sort de la scène de crime au début, ou alors pendant la scène de l'ascenseur qui s'amuse avec nos nerfs. Quant au final, qui en est un sans réellement l’être; il se pose comme le baromètre d'une époque révolu et qui avec cynisme annonce avant l'heure le rôle « des lanceurs d'alertes »

Car c'est dans aspect politique que le film fait très fort et qu'il s'impose comme un classique instantané. Le réalisateur Sydney Pollack délivre un constat plein d'amertume sur l’Amérique des années 70, qui vient de prendre une baffe monumentale avec l'affaire du Watergate. Surtout qu'au moment des faits, le slogan « La Loi et l'Ordre » régissait la politique intérieure de la présidence Nixon, ce que le statut-quo au début du film représente, un ordre et une discipline que les agents de la CIA respectent, mais quand Turner comprend qu'il a été trahi, il est sous le choc, comme l'on était des milliers d'américains face au Watergate. Au final on s'interroge aussi sur le contexte du film, mais aussi sur ce que cela implique de nos jours, sur la difficulté possible ou avérée de faire plus ou moins confiance à des institutions aux comportements délictueux et surtout à écouter ceux qui nous préviennent ! Maintenant, ils se nomment, John Kiriakou, Thomas Drake, Jesselyn Radack ou encore Edward Snowden et font la même chose que « Le Condor », ils alertent …
Quant au casting, c'est du quatre étoiles ! Joseph Turner dit « Le Condor » est joué par l'inimitable Robert Redford. Acteur engagé, il se glisse dans les pas de son personnage avec toute l'élégance qui le caractérise. Et cela pour un résultat plus que convenable, Redford joue avec nuance et insuffle ce qu'il faut d'énergie et d'urgence pour que l'on croit à son histoire. On trouve aussi Faye Dunaway dans le rôle de Katherine Hale, la personne que Turner prend en otage pour avoir un endroit sur ou se réfugier. Hélas son rôle n'est pas des plus intéressant et cela consiste pour la plupart du temps à crier ou a maugréer envers son ravisseur, avant qu'ils ne couchent ensemble. Puis il y a l'impeccable Cliff Robertson dans le rôle du responsable de la C.I.A à New-York, ainsi que Max Von Sydow en tueur froid et implacable qui se révèle aussi terrifiant, que drôle et pétri d'un cynisme a vous glacé le sang. 

Un film au propos dévastateur et en phase avec son époque ou les questionnement d'avant n'en reste pas moins d'actualité.



You May Also Like

0 commentaires

Rechercher dans ce blog