Dernier Amour

by - avril 16, 2019


DERNIER AMOUR
de Benoît Jacquot

Casanova est au bout de son errance, à la fin de sa vie il est bibliothécaire privé au fin fond de la bohème, dans le château d'un homme richissime. Seul dans ce château avec des domestiques qu'il méprise, sa seule distraction une jeune fille blonde, la nièce de son protecteur. Au lieu de jouer les répétiteurs comme prévu et étudier les philosophes grecs, elle préfère que le vieil homme à la respiration sifflante lui raconte sa vie. L'épisode londonien est celui qui est au programme ce jour là. Il vient juste après que cet homme est été banni de Venise.


Ce film est représentatif de ce dont on parle lorsqu'on brocarde le cinéma français, et c'est clairement ce qui nous donne à réfléchir devant cette proposition de film de l'hexagone.
C'est d'abord un très joli entre soi. Vincent Lindon, acteur charismatique et capable d'incarner ce séducteur vieillissant. Benoit Jacquot réalisateur au curriculum vitae jalonné de succès, Chantal Thomas qu'il a rencontré avec Adieux à la reine en 2013. Chantal Thomas est une écrivaine scénariste mais surtout c'est une historienne qui est spécialisée dans le XVIIIeme siècle, Sade, Casanova et Marie Antoinette. Ainsi que l'étoile montante Stacy Martin. C'est aussi des noms prestigieux en veux-tu en voilà au générique comme par exemple les frères Dardenne à la production.

Mais c'est une image décevante qui nous accueille. Les lieux sont sublimes avec un éclairage qui se veut d'époque voire naturaliste mais qui souligne cruellement une lumière mal travaillée et une photographie décevante qui ne met jamais en valeur les châteaux, les demeures, ces lieux d'exceptions. J'ai probablement vu ce soir, les scènes les plus mal éclairées et les plus sombres d'un film, scènes qui ne peuvent pas seulement être l'illustration d'un parti pris alors que ce film a un budget de six millions et demi d'euros.

Puis quand on regarde un film historique on veut se balader un peu dans la ville, mais n'y compter pas. A part un coin de rue reconstitué, un parc, deux trois jardins privés...vous ne verrez que des intérieurs.



Le scénario est poussif, inspiré aussi de l'autobiographie de Casanova, le pitch tient sur un post-it, un tout petit, celui pour marquer les pages. Manger; faire des choses de la sexualité; se plaindre, vouloir dominer. Et on arrive au point crucial de ce film pour moi. Comment parler de Casanova après "me too", comment l'art doit évoluer pour arrêter de prendre des femmes pour des sacs de viande, et réfléchir comment les filmer, comment les faire évoluer. Si vous inventer des personnages pour les faire interagir avec un personnage historique, ne peut-on pas avoir une réflexion. Dans ce film Casanova raconte la fois où il a été fou amoureux, il devient fou d'un amour non consommé, il devient fou de ne pas posséder cette jeune fille. Comme postulat c'est déjà pas mal ,sachant que d'après ce que j'ai lu cette jeune femme n'a pas existé, mais il faut en plus qu'il l'est connue enfant, et qui lui est fait un cadeau. Mais quand est-ce que les cinéastes foutrons la paix aux petites filles, et qu'ils ne mettront plus en corrélation l'enfant et l'adulte aux amours tarifés. Comment un mec normal peut voir son excitation pour une femme majorée quand elle lui rappelle l'enfant qu'elle était.

Pour le reste la sur utilisation de la nudité de la femme, trouve son apothéose en fin de film quand Casanova et son ami Claremont se retrouve dans un lupanar et qu'une jeune femme lève sa chemise lui montrant son sexe , et lui demande de se déshabiller et il répond en substance je ne vais pas me déshabiller, j'ai ma dignité. Et c'est ça s'est appliqué durant tout le film. Les femmes nues se succèdent, les mecs, enfin casanova reste habillé, le seul moment où il est nu de dos (merci à la doublure de Vincent Lindon …) il est habillé ou caché par des corps nus de femmes. La nudité féminine est l'élément prégnant de ce film. Ce n'est ni la frustration, encore moins la séduction, il n'y en a pas.



Je ne peux pas passer sur le racisme latent du scénario. D'un Casanova qui ne parle que français et qui ne cherche jamais à apprendre l'anglais. La manière dont le scénario parle des anglais, la manière dont il introduit la vision qu'il a de ce peuple est ahurissante. Je ne sais pas si c'est écrit dans le récit de Casanova, et quand bien même le scénario est fictif, il y avait d'autres manière de raconter des choses. Quant au serviteur de Giacomo que ce soit un indien, c'est très gênant.
Les acteurs sont perdus dans le vide du scénario. Vincent Lindon pose, il délivre une prestation qui a du mal à convaincre tant il a peu à dire, tant il n'est pas aidé par tout ce qui l’entoure. Un peu comme Valeria Golino qui a un rôle dont on a du mal à trouver l'utilité. Quant à Stacy Martin son jeu est la bouffée de fraîcheur du film, avec un rôle tout sauf beau et bien écrit.

Ce film est un film d'une autre époque. Et pas seulement sur le fond, son utilisation du corps de la femme une image improbable de nos jours, et tant d'autres choses. Mais pire que tout c'est un film aux idées étriquées.

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