Paterson

by - janvier 16, 2017


PATERSON
de Jim Jarmush


Ça fait plusieurs jours que j'ai vu Paterson.
Ça fait plusieurs jours que je me demande comment retranscrire ce que j'ai ressenti.

Je me suis mise devant mon ordi. Mais ce n'était pas possible d'écrire sur ce film sans passer d'abord par l'écrit. Tant la caresse du papier et la griffure du stylo font partie intégrante de cette œuvre.

C'est donc sur cette image que commence le billet. Paterson, écrivant sur son carnet des mots.
Paterson vit à Paterson. Il est chauffeur de bus dans cette ville du New Jersey.
Mais Paterson est plus complexe que ça. Il aime la poésie, et il en écrit. De la poésie en vers libre inspirée de l'école new yorkaise. Poésie sur la vie quotidienne. Mais qui raisonne comme des poèmes sur l'amour qu'il éprouve pour sa belle et douce compagne Laura. Ce film les suit pendant une semaine d'automne avec des couleurs chaudes et qui sentent bon la douceur de vivre. Mais Paterson n'est pas celle que l'on croit. C'est une ville qui a nourrit de nombreuses personnalités des sportifs, des anarchistes et un poète William Carlos Williams.C'est un terreau fertile pour ceux qui veulent se laisser tenter.
Le réalisateur nous montre peu la ville. Il ne lève que rarement le voile. Elle devient fantasmée à l'image de celle que décrit Williams dans ces poèmes. Et on se dit que l'on pourrait aller la visiter pour retrouver un peu l'ambiance du film. C'est magistralement fait.


Une autre chose est menée de mains de maître, c'est le déroulé du film. Paterson a une vie très routinière. En s’arrêtant plus ou moins sur une période de la journée. Nous laissant nous appesantir sur des moments qui nous en dévoilent un peu plus sur notre chauffeur, sur son processus de création, ou son amour de la poésie. Le réalisateur arrive à créer un attachement particulier à ses plaisirs simples. On se surprend à attendre qu'il ouvre sa boite à repas, pour voir comment sera le cupcake que son amoureuse lui aura cuisiné et qu'elle photo d'elle, elle y aura glissé. Ce sentiment est représentatif de ce que j'ai ressenti tout le film.

Il y a une ambiance très particulière qui est créée par une multitude de détails. D'abord par la lumière. Le film est toujours ensoleillé. J'aime l'éclairage du bus, le soleil qui le traverse de part en part. Il ressemble a un îlot de clarté. Et le trajet dans le bus devient un moment suspendu dans le temps dans la journée, quelque chose de singulier.
Singulier aussi, les choix de décors très marqués. Les acajous et les cuirs bruns du bar, le goût pour le noir aux motifs design blancs, et le diy avec lesquels Laura décore leur maison, leur chambre... tout est choisi pour accentuer le coté cocon de ce film, et le sentiment de bien être.
Et c'est dans cet écrin que l'on reçoit les poèmes qu'écrit paterson. Dans la forme ils sont à la fois lu par Adam driver et s'écrivent comme calligraphiés sur l'écran. Ce sont des poèmes majoritairement empruntés à Ron pagett. Ils sont d'une accessibilité qui nous permet de croire que l'on pourrait les écrire. Alors qu'ils sont si parfaits, si beaux, si épurés que l'on serait bien incapable de le faire. Le choix de leurs apparitions, est judicieux. Ils montent en puissance pendant le film, dévoilant toujours plus les sentiments du poète. Pumpkin l'un des derniers m'a émue aux larmes.

La force de ces poèmes est mise en relief par Adam Driver qui incarne Paterson. Sa voix leur donne vie et on charisme leur donne corps. Il balade sa longue silhouette et il arrive à jouer cet artiste curieux de tout, mais d'une modestie qui l’empêche de se livrer. Il est vibrant. Il arrive à jouer le silence tout en lassant transparaître ce qu'il ressent. Une vraie performance.
Il y a sa chérie Laura jouée par Golshifteh Farahani. Je déteste parler d'une actrice et commencer en disant qu'elle est belle, car évidemment elle est plus que ça. Mais la mettons nous d'accord, elle est perfection! Dans ce film Laura est complémentaire à son amoureux. Elle est la légèreté, avec cette facette « arty » très extravertie. Ce personnage est solaire. Elle rayonne des qu'elle apparaît à l'écran, et garantit au spectateur un sourire. Elle fait du bien.
Puis il y a leur chien, leur « fur baby », il est l'élément comique du film. Il équilibre le couple. Jamais l'un ne semble prendre l'ascendant sur l'autre. Malgré leurs différences et les situations qui poussent à sourire, c'est toujours avec lui que l'on rit. Il est extraordinairement attachant.

J'ai tout aimé dans ce film. La justesse des mots, la douceur des décors,et l'amour qu'ils racontent.

You May Also Like

4 commentaires

  1. Encore de bien belles affiches qui traduisent à merveille toute la poésie dégagée par ce film. Bien belle prose également qui se glisse entre les lignes des grands poètes de l'école de New York. Bien beau film enfin qui montre que la poésie n'est pas réservée à des illuminés perfusés au spleen.

    RépondreSupprimer
  2. merci, la première affiche que tu vois, qui est signée sur le coté vient du "new yorker" les autres c'est beaucoup de chance et du temps passé sur google.
    mais surtout de la chance!

    RépondreSupprimer
  3. Tout est dit.
    Qui eu cru qu'un film sur la poesie pouvait etre aussi prenant tout en montrant que une facette moins mis en avant de cet art. Jim jarmush il assure. Adam driver il est de plus en plus souvent au cinema. Dans ce role je le trouve à sa place. Tu fais bien de souligner la presence lumineuse de l'actrice car contribue à part egale à la beauté du film.
    J'avais beaucoup aimé coffee and cigarette qui avait deja un côté tres poétique, de cette poésie du quotidien dont on parle peu

    RépondreSupprimer

Rechercher dans ce blog