Battle Royale

by - mars 14, 2015


Dans un avenir proche, les élèves de la classe B de 3ème du collège Shiroiwa ont été amenés sur une île déserte par une armée mystérieuse. Un adulte surgit tout à coup devant eux : leur ancien professeur Kitano. Il leur annonce qu'ils vont participer à un jeu de massacre dont la règle consiste à s'entretuer. Seul le dernier des survivants pourra regagner son foyer. Kitano leur présente deux nouveaux élèves très inquiétants. Des coups de feu retentissent pour convaincre les incrédules. Selon la loi de réforme de l'éducation pour le nouveau siècle, ce sacrifice permettra de former des adultes sains. Abandonnés chacun à son sort avec de la nourriture et une arme, les adolescents disposent d'un délai de trois jours pour s'entretuer.

Battle Royale – 21 Novembre 2001 – Réalisé par Kenji Fukasaku

L'adolescence ne fut pas la période de ma vie que j'ai préférée. C'est une période compliquée, étrange, hostile où quoique l'on fasse le monde extérieur nous parait abscons ! Et on cherche, j'ai cherché des moyens d'expressions ou des activités pour me rassurer et m'aider à mieux appréhender la réalité. L'un d'eux, était le cinéma et ses milliers de films a découvrir. Battle Royale de « feu » Kenji Fukasaku en est le plus bel exemple. Survivor en apparence, il ne cache pas moins qu'une violente lettre ouverte sur la place de l'enfant, de l'adolescent plus particulièrement dans une société qu'il ne comprend pas. Fukasaku n'en oubli pas pour autant les adultes, en se montrant tout aussi critique.

On sait peu de choses du climat politique qui règne au Japon si ce n'est que les adultes se méfient de la jeunesse. Cette défiance grandissant, le gouvernement promulgue une nouvelle loi, la loi « BR » ! Le principe est simple, une classe de 3eme est tirée au sort pour participer sur une île, à une tuerie de 3 jours ou un seul élève doit survivre. Le seul but de cette loi, est de contrôler et saper le moral des plus jeunes. Malgré tout, cela ne se passe pas toujours bien et le professeur Kitano va l'apprendre à ses dépends.

Le scénario qui est écrit par Kenta Fukasaku, tient ses inspirations du roman « Battle Royale » de Koshun Takami. Un roman d'anticipation qui place son cadre dans un état autoritaire, semblable aux plus viles des dictatures ayant existé. Le programme BR étant alors un moyen depuis plus de 50 ans d'affirmer l'autorité du pouvoir et d'entretenir un climat de méfiance permanent pour éviter tout soulèvement. Un cadre historique et politique qu'occulte le film. Un parti pris que je trouve dommage mais qui néanmoins permet au film de se concentrer sur les ados, adultes ainsi que sur la relation qui les unis.

La classe choisie pour participer à la Battle Royale, présente (je crois) tout les profils d'adolescents possibles et inimaginables. Le timide, le taiseux, l'intellectuel, la sportive, la rebelle, le suiveur, le gentil, le complexé …

Tous ont en commun cette incompréhension vis a vis de la société dans laquelle ils évoluent. Un monde profondément nihiliste ou rien n'est destiné à changer. Plus de dialogue, plus d'espoir, plus de cadre, de confiance ou encore d'amitié. Les adultes ne se font plus d'idées, hormis exception, la jeunesse n'est bonne à rien, violente et agressive. Les adolescents quant à eux, ils sont désabusés et désarmés dont leur seul moyen d'expression reste principalement la violence. Et c'est dans cette parabole hyper-trash de l'adolescence que l'essence du film se trouve. Pique virulente envers un modèle japonais déclinant qui n'est plus en phase avec la relève que représente sa jeunesse. Ou la sélection naturelle se fait de plus en plus dure à l'entrée de la vie active. Fukasaku fait ainsi ressortir avec beaucoup d'ironie cette opposition au travers de ce jeu, ou il reprend les codes d'une télé que l'on déteste presque tous. Le concept est crée par des « vieux », l'animatrice est un faire-valoir un poil plus âgée pour les mettre en confiance, ils intègrent deux anciens participants qui confirment implicitement le bien fait de la loi ainsi que de la violence a tous les étages ! Le prix final ? Le droit de vivre et d'évoluer chez les grands !

Une façon de traiter le passage à l'age adulte assez fracassante, qui restitue « les épreuves » qu'un adolescent doit subir pour s'affranchir de toute autorité et enfin suivre sa propre voie ! Une voie qu'incarne certains des personnages, comme Noriko, Shuya ou Shogo. Trois lumières au fond de cette île perdue, qui veulent voir autre chose que ce que l'on leur offres, c'est a dire une vie sans confiance, sans amour, sans amitié et sans espoir. A la fin, un infime espoir existe, c'est en opposition avec l'intégralité du film qui est dans le fond assez triste …

Si le propos est intéressant, le film en lui-même n'est pas des plus réussi malgré le talent Kenji Fukasaku. La faute tout d'abord a un rythme en dent de scie, le réalisateur enchaîne les scénettes sans jamais se soucier d'un semblant de continuité et le montage très sec accentue cet effet là. Il ne se prive pas par contre pour livrer des morceaux sanglants de hautes volées. C'est sec, brutal et parfois assez gore. Une violence assez graphique, ou le contraste du sang marque les esprits par rapport aux uniformes de couleurs claires que portes les élèves. Le point fort du film reste avant tout la composition Masamichi Amano qui reprend des extraits de musiques classiques pour créer et orchestrer une atmosphère musicale pesante, lourde et très triste.


Un survival mélancolique, triste et désespéré porté par un fond pertinent ! 


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8 commentaires

  1. Un survival virulent taclant les institutions mais aussi les jeunes. On leur dit qu'ils doivent s'entretuer ils le font. Ils n'ont aucune morale et surtout les rivalités explosent que ce soit entre hommes et filles (surtout elles il n'y a qu'à voir la scène de la cuisine). Et puis il y a Takeshi Kitano. Pas osé voir sa suite.

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    1. La suite fait vraiment peine à voir ...

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    2. Un pote (le même qui m'avait prêté ce film) m'a dit la même chose. Raison de plus pour ne pas la voir au risque d'être déçu.

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    3. c'est surtout un produit un peu "batard", commencé par Kinji Fukasaku, finit par le fils Kenta, bref c'est pas joli, joli ...

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  2. Très belle analyse. Pour moi, c'est un grand film, largement en avance sur tous les pièges à ados qui garnissent aujourd'hui les écrans (de hunger games à Labyrinth et j'en passe). Quant à la réalisation, même si elle peut apparaître un peu datée aujourd'hui (encore que), voire maladroite (un Fukasaku en fin de vie), elle reste étonnamment inspirée de Kubrick (la musique classique), jusque dans l'exploitation des images comme ancêtre obscène de la télé-réalité (le décompte des tués sur l'écran, le présentateur joué par Kitano). A voir.

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    1. Merci pour le compliment. Il est vrai que ce film a bien 15 ans d'avance sur tout le monde, c'est frontal et Fukasaku n'épargne rien, de plus il titille suffisamment de point sensible et véridique de toute société contemporaine pour que l'on soit directement impliqué dedans ! Ensuite le film en lui meme, il ne me déplait pas, les défauts que je cite ne sont pas disqualificatif à mes yeux car le fond passe avant ça et c'est clairement sa grande qualité !

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  3. Raaah j'adore ce film, paradoxalement violent, fun et mélancolique à la fois (avec des scènes vraiment marquantes), mais avec un véritable fond, notamment sur cette société japonaise trop méfiante envers les jeunes. J'adore également Kitano dans ce film. C'est vrai que la réalisation n'est peut-être pas le fort de ce film, pourtant je ne la trouve pas mauvaise. Je comprends ce que tu veux dire sur les effets d'enchaînements et le montage. Pour ma part, je trouve que ça accentue encore plus la monstruosité du jeu, il y a quelque chose de froid qui m'a plu. Par contre, la suite est une merde sans nom (je crois que je me suis même endormie !).

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    1. Je l'apprécie aussi mais j'ai du m'arreter la dernière fois que je l'ai vu, beaucoup trop sombre pour moi. Le fond est vraiment intéressant meme si je ne l'ai vu que récemment, car quand j'étais plus jeune je n'y voyais pas les memes choses. Et quant à ce que je pointe, c'est loin d’être discriminant à mes yeux car l'essentiel n'est pas là. J'approuve aussi ce que tu penses de la suite !

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