La Forteresse Cachée
LA
FORTERESSE CACHEE
Akira
Kurosawa
Les principaux
films d'Akira Kurosawa ressortent au cinéma. Les voir à Bordeaux
revient à dealer avec le cinéma le plus caractériel de la ville.
Il a été impossible de voir tous ceux que l'on nous a conseillés.
Mais j'ai pu avoir mon baptême avec celui là.
Dans le Japon du
XVIe siècle deux hommes sont en fuite. Ce sont deux paysans qui ont
tout vendu pour aller combattre. Ils espéraient revenir couverts
d'or et de gloire, mais ils sont arrivés à la fin du combat,ont été
fait prisonniers et passent leurs temps à creuser, à fuir, à se
faire rattraper, à creuser, à fuir... jusqu'au jour,ou au grès
d'une de leur fuite ils découvrent une barre d'or, rencontre un
homme mystérieux et inquiétant qui finira par les convaincre
de...creuser. Mais cela n'est qu'un début. Car plus qu'un film sur
une quête c'est un film sur une odyssée, et même pour certains des
personnages un voyage initiatique.
Avant de parler à
proprement du film je tiens à vous causer de sa forme et à évacuer
sa paternité.
Commençons par
l'aveu de George Lucas, il s'est inspiré de cette œuvre pour créer
la guerre des étoiles. Effectivement quand on vous le dit, vous
n'avez aucun problème à reconnaître les éléments. Mais moi qui
ne l'ai su qu’après ça ne m'a pas sauté aux yeux pendant le
visionnage. C'est très sensible sur le fond et pas du tout dans la
forme. Le découvrir c'est aussi le voir libre de ce préalable sinon
c'est courir le risque d’être déçu.
Comme je le
précisé en introduction, il est mon premier Akira Kurosawa, et je
me refuse à réécrire bêtement ce que j'ai lu ou m'attribuer des
expériences que je n'ai pas. Je sais qu'il est particulier car il
est beaucoup moins violent que ceux qui le précédent et qu'il est
le premier qu'il filma en cinémascope.
Ce choix lui permet de donner
une profondeur à certains moments. Pendant une scène de rébellion
avec une centaine de figurants, ce format amplifie cette impression
de foule de suffocation, de vague qui emporte tout, même nous en
train de regarder. Ou de créer des paysages quasi irréels
enveloppant une frontière de nappe de brouillard, la dématérialisant
symbolisant son inaccessibilités. La réalisation s'en sert aussi
pour mettre en relief les caractéristiques de certains personnages.
Les positionnant seul en haut d'une colline, et les filmant en contre
plongée, rajoutant à leurs charismes
et nous parlant de leurs rangs
sociaux.
La réalisation
et sa composition de l'image est un vrai bonheur, d'une princesse
endormie nichée au creux d'un arbre à un combat de samouraïs...
J'ai eu l'impression, d'avoir à nouveau sept ans. Tout est étudié
et rien n'a vieilli.
J'aime beaucoup
les noirs et blancs très tranchés avec de forts contrastes. Là le
noir et blanc est plus subtile, il est utilisé comme un élément de
narration à part entière et moins pour son esthétisme.
les gens qui
veulent définir un film par un mot ont beaucoup de mal, je serai
bien incapable de le faire. Mais en recherchant les noms des
provinces que nos personnages devaient traverser (noms que je n'ai
jamais retrouvé),j'ai lu que c'était un film de princesse. Et j'ai
eu envie de mordre.
Yukihime qui est
la princesse en fuite est le vecteur d'un discours humaniste. C'est
elle que l'on suit, c'est elle qui évolue et qui énonce l'idée
humaniste qui sous tend tout le film. Elle est un personnage fort,
capable de commander et gouverner en temps que seule héritière, la
survivante d'un clan. Elle a cette manière de crier, ou plutôt de
parler fort dans une expiration. Misa Uehara compose un personnage
avec un jeu très actuel. Le plus souvent en jouant avec sa posture,
et sans sur-jeu. Je glisserai un mot sur l'autre personnage féminin,
celui de la paysanne, courageuse, dévouée. Dans ce film chaque
personnage féminin est droit et sans faille. C'est un message auquel
je ne m'attendais pas.
Mais celui qui
incarne la droiture est le général Rokurota Makabe joué par
l'acteur fétiche du réalisateur Toshiro Mifune, tout en droiture et
en force, même son rire respire ces caractéristiques. Il incarne
aussi le sens du devoir et de l'honneur. Il est le personnage central
du film qui est le lien entre tous ces
protagonistes hétéroclites.
Nos deux paysans
sont interprétés par Minoru Chiaki (Tahei) et Kamatari Fujiwara
(Matashichi)sont là pour amener la légèreté dans le film. C'est
toujours de l'humour situationnel ou à base de mimiques. Je n'ai eu
aucune sympathie pour eux. Et on est soulagé de ne plus les voir au
moment ou finit le film.
Ce film m'a
surprise. Je ne sais pas bien ce que j'attendais de lui, peut être
une leçon de cinéma qui aurait vieilli, mais ce ne fut pas du tout
le cas. Il m'a parlée de moi, de mes valeurs et en a profité pour
réveiller l'enfant de sept ans qui aimait les films de samouraïs.
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