La la land

by - février 09, 2017



Au cœur de Los Angeles, une actrice en devenir prénommée Mia sert des cafés entre deux auditions. De son côté, Sebastian, passionné de jazz, joue du piano dans des clubs miteux pour assurer sa subsistance. Tous deux sont bien loin de la vie rêvée à laquelle ils aspirent… Le destin va réunir ces doux rêveurs, mais leur coup de foudre résistera-t-il aux tentations, aux déceptions, et à la vie trépidante d’Hollywood ?
La la land – 25 Janvier 2017 – Réalisé par Damien Chazelle

En trois films, le cinéaste de trente deux-ans Damien Chazelle a mis Hollywood à genoux! Oui rien de moins! A genoux devant un talent hors norme qui à éclater il y a de ça trois ans avec l'éreintant « Whiplash ». Un film que personnellement je n'ai pas apprécier, notamment à cause de son propos; mais malgré ça, le film possède une force, une énergie, un tempo, une musique et une mise en scène à la précision chirurgicale. Des qualités encensés par la presse, par les diverses cérémonies et surtout par le public. Et il récidive trois ans plus tard avec encore plus d'audace, en ressuscitant brillamment un genre au combien galvauder « la comédie musicale » …

Coincée dans un énième embouteillages sur l'une des bretelles de l'autoroute à Los Angeles, Mia jeune actrice en devenir répète comme elle peut pour sa prochaine audition. Brusquée par un conducteur peu aimable qui lui klaxonne en non-stop, elle continue cependant sa route. Hélas cette journée ne fut pas celle qu'elle espérait, l'audition fut infructueuse et la soirée dans laquelle ses amis l'embarquent ne fut que futilité entre gens qui cherchent juste « le contact » qui les fera décoller. Pire en partant de là, elle ne retrouve plus sa voiture. Mia déambule ainsi seule dans Los Angeles, quand elle entend des notes de piano, une mélodie mélancolique et pleine de charme qui vienne d'un pianiste en colère. Quelques mois plus tard, alors qu'elle est dans une fête sur les hauteurs de L.A, Mia rencontre à nouveau ce pianiste qui se nomme Sebastian. Toujours aussi désagréable, il ne semble pas insensible au charme de l'actrice. Tous les deux quitte la fête ensemble et la magie commence à prendre entre ces deux rêveurs …

4minutes et 45 secondes !!! C'est exactement le temps qu'il a fallut au film de Damien Chazelle pour me convaincre de le suivre dans cette nouvelle aventure. Juste ce qu'il faut pour livrer un pur hommage à l'age d'or des comédies musicales ou en un temps minime, la réalisation de Damien Chazelle par la grâce d'un plan séquence millimétré danse au rythme de la chanson et des danseurs. Un prologue sensationnel que Robert Wise aurait apprécié et qui met en exergue bien des problématiques que le film soulève. Car si au bout de quatre minutes, on a un grand sourire sur le visage, le réalisateur n'oublie pas ce que doit être une bonne comédie musicale, à savoir le reflet d'une situation donnée que la danse, le chant et la comédie seront nous transmettre sans en avoir l'air.

« That now our dreams They've finally come true »

A l'écriture on retrouve Damien Chazelle qui continue avec « La la land » d'explorer certaines thématiques abordées dans « Whiplash », notamment par le prisme du jazzman blasé qui sacrifie presque tout pour une réussite tout aussi incertaine. Une redondance qui ne gène pas, car c'est bien plus nuancé et que surtout la romance est une pure histoire de comédie musicale. Alors j’arrête tout de suite les esprits chagrins et leurs arguments en cartons comme « c'est naif », « niais » ou « gnangnan », car d'une cela doit être la première comédie musicale que vous regardez et de deux ce ne sont pas des arguments, mais bien des éléments propre au genre que Chazelle s'approprie.

En 25 minutes le film pose les bases du récit qui se déploie devant nous, on fait connaissance avec les deux personnages et leurs univers ainsi qu'avec les problématiques que la vie leur pose à « La la land ». Comme nous sommes dans une comédie musicale, l'extravagance est permis, le réel n'est plus celui qu'on connaît mais celui posait par le réalisateur en 4 min au début, un monde fait de danses, de couleurs, de chants et de sentiments exacerbés ou tout est possible. Un univers onirique ou Damien Chazelle nous conte une romance pleine de charme, avec des hauts et des bas, certes qui peut sembler sans surprises, mais l'originalité se mérite et cela viendra à la fin par un épilogue à la fois tendre et d'une cruauté sans pareille. On y trouve aussi des références diverses et assumées, comme le cinéma de Demy, Chantons sous la pluie, West Side Story, Tous en scène ou encore certains films avec Fred Astaire et Gingers Rogers, sans que l'on ai l'impression de la citation pour la citation. Chaque pas de danse ou notes de musiques à un sens et apporte sa pierre à l'intrigue.


« They worship everything and they value nothing »

Comme « Chantons sous la pluie » qui parlait du déclin du cinéma muet et de sa transformation, comme « Cabaret » qui parlait de la montée du nazisme, ou encore « West Side Story » qui abordait l'immigration aux USA, l'histoire de « La la land » ne s’arrête pas à celle de Mia et de Sebastian. Le film fonctionne sur des dualités, homme/femme, passé/futur, nostalgie/modernité, cynisme/innocence, originalité/mainstream, amour/solitude et bien d'autre qui exprime pour ma part (et avec une dose de subjectivité) deux choses.

Damien Chazelle creuse encore plus le coté cathartique que représente la fiction pour parler de lui. Si la jeunesse du réalisateur comme apprenti batteur de jazz résonnait dans « Whiplash », Mia et Sebastian sont ici les deux faces d'une même pièce et se pose comme deux aspects de la personnalité du réalisateur. Cela représente ainsi le dilemme qui s'impose à Chazelle depuis qu'il est dans le milieu; d'un coté est ce qu'il faut déclarer une fois encore son amour au jazz, à ce qu'il aime ou alors est ce qu'il faut qu'il revienne à des choses plus basiques quitte à faire ce qu'il n'aime pas, mais qui capteront à coup sur un public plus large ? Un choix cornélien qui nécessitera forcément des sacrifices entre une réalité qui ne fait pas de cadeau et l'intégrité artistique.

Ce qui m’amène à revenir sur l'une des phrases dites par le personnage de Ryan Gosling « They worship everything and they value nothing » qui veut dire « Ils admirent tout, mais ils ne respectent rien » qui s'adresse directement à l'industrie hollywoodienne, dont le titre se fait l'écho. Oui « La la land » est autant un titre, qu'un surnom de Los Angeles, qu'un surnom négatif qui pointe la superficialité d'Hollywood et de facto ce qu'il en sort actuellement.
C'est une industrie qui a presque plus de respect pour les billets verts que pour les différents acteurs qui lui permettent d'exister. Elle ne respecte plus les acteurs, les actrices, les réalisateurs …
Elle peut faire l'ingérence dans la production d'un film ou encore ne pas payer les employés d'une compagnie d'effets spéciaux, du moment qu'on ne les vois pas pendant les cérémonies.
Et elle n'hésite pas à recycler des vieilles recettes, sans jamais se poser la question de la plus-value que l'on peut y apporter. Les come-back récents de certaines franchises comme Star Wars, Jurassic Park ou encore Ghostbuster portent en eux toutes les qualités et les tares de ce système, qui coincé entre la nostalgie et le présent, entretient une usine à rêves florissantes, attirantes, mais ou l'originalité se fait de plus en plus rares …

« People love what other people are passionate about »

C'est insolent à trente deux ans d'avoir autant de talent que Damien Chazelle. Alors ce n'est pas un reproche, mais un constat et de ce coté là, il réitère tout ce que j'ai pensé sur lui de bien avec « Whiplash ». Bon j'ai quand même deux, trois bémols à dire, notamment sur le début et la fin du film qui force un peu sur les références (l'épilogue dans son genre est presque indigeste), sur la transition entre le point de vue de Sebastian et Mia dans les 25 première minutes que je trouve un poil facile et sur un léger manque de rythme dans le dernier tiers (un autre numéro de danse ou de chant n'aurait pas était de trop) mais sinon c'est un sans faute. On retrouve un réalisateur qui sait ou il va, c'est précis, admirablement bien découpé, rythmé, le cadre est magnifié par l'usage du cinémascope, c'est grand, large, il occupe ça dans sa totalité pour des scènes d'une ampleur phénoménale. Son travail s'accorde parfaitement avec ce qu'il raconte, rien n'est superflu, chaque chansons à une utilité et un sens dans l'histoire. Le prologue est un manifeste vivant et vibrant qui nous introduit dans « La la land », la chanson « Someone in the Crowd » est un état des lieux moral de Mia et « A lovely night » une sérénade sous les étoiles qui voit naître une amitié franche, un échange amical qui selle leur amitié.

Mais à la poésie des mots, il faut ajouter celle des corps que Mandy Moore prend en charge. Cette chorégraphe livre un travail presque aussi important que celui de Damien Chazelle, avec des chorégraphies titanesques comme pour le prologue du film. Une séquence qui a demandé des mois de labeurs et de préparations pour une séquence dynamique et enivrante dont on se souviendra longtemps. Elle est aussi à l'aise pour les numéros plus intimistes, notamment avec le duo Gosling/Stone ou les chorégraphies sont en adéquations avec les chansons, c'est soit plein de rondeurs et de douceurs ou alors bien plus énergique; on sent ainsi aisément les émotions qui les traverses quand ils exécutent les pas qu'on leur a appris.

Si il ne faut pas oublier la photographie soignée de Linus Sandgren, pleins de couleurs chaudes et tons pastels qui d'un coté fait de Los Angeles une ville de rêve pour des rêveurs, mais de l'autre cela ne fait qu'accentuer l'aspect factice de l'endroit ou l'on se trouve. Le troisième élément indispensable et qui fait mouche dans « La la land » c'est la bande originale. Pour la composer Damien Chazelle retrouve son complice de la fac, le compositeur Justin Horwitz. Il signe une composition magnifique, pleine de joie, d'ivresse et de mélancolie qui vous restera bien des heures dans la tête après la fin du film. Un travail d'une immense qualité, pour un acteur essentiel dans la réussite de ce long métrage.

Quant au casting, il tient en deux acteurs, les incroyables Emma Stone et Ryan Gosling qui ne font littéralement qu'un à l'écran. Un duo dont je me réjouis de voir ici, surtout quand le réalisateur avait prévu Emma Watson et Miles Teller à la base. Ces deux acteurs se retrouvent ensemble une troisième et leur complicité éclaire les deux heures que dure le film. On ne croit pas seulement à leur histoire, on souhaite simplement que cela deviennent réalité. Si j'ai une préférence pour Ryan Gosling que je trouve de plus en plus épatant, la pétillante Emma Stone irradie de sa sensibilité la pellicule. Bref je ne sais pas si ils seront un duo mythique dans trente ans, mais à l'heure actuelle c'est certainement l'un des duos à l'écran des plus complémentaires qui puissent exister.


Une vrai perle !



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6 commentaires

  1. Bon ben comme tu as pu le voir, je suis quelque peu sceptique. Pas que le film soit mauvais, son propos est bon, ses acteurs aussi, la réalisation est léchée, la musique de qualité. Mais... ça ne me parle vraiment pas, les acteurs ne font pas non plus des performances monumentales (d'autant que ce sont des acteurs que je trouve très bons en général), c'est bien plus tape à l'oeil que Whiplash et les chansons ne m'ont absolument pas convaincu. De même je n'ai pas ressenti de réelle émotion pour les personnages et leurs parcours. Tout le contraire d'A monster calls..

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    1. Quand ça parle pas, ça parle pas :)

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    2. Parfois ça arrive. Le seul truc qui m'a vraiment plu c'est le passage Modern Talking. J'étais plié. Oui je sais je suis bizarre, je ne retiens que des scènes à la con! :D

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    3. C'est souvent ça quand on est pas pris dans un film

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  2. Je suis allé le voir avec réticence car les comedies musicales c pas mon truc. La 1ere scene m'a fait peur mais optimiste je me suis dit le pire est passé. Heureusement ca c est avéré vrai. Ca chante peu, ça danse souvent dans un style retro que j'apprecie et oh surprise ca jazz beaucoup d'un air melodieux. J'en suis sorti enchanté.
    Je vois la fin com une reference au jazz ac cette capacité de variation entre artiste sur une melodie au meme moment. Le fait que les quelques chansons sont au servoce de l'histoire et non l'inverse est un plus enorme. Resonnantes sont les dualité stress beau, tres touchant ac un certain réalisme de par l'abord de ces dualités et de l'evolution de la reelation de 2 protagonistes. J'en suis sorti boosté et enchanté.
    Je ne savais pas que c etait un si jeune réalisateur et qu'il a fait whiplash que j'ai helas pas vu bien sue l'envie y etait. Faudra que j'y remédie ^^

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