The Age of Shadows

by - juin 19, 2017


Les années 1920, pendant la période d’occupation de la Corée par le Japon. Lee Jung-chool, un capitaine de police coréen travaillant pour la police japonaise, doit démanteler un réseau de la résistance coréenne dont il réussit à approcher l’un des leaders, Kim Woo-jin. Les deux hommes que tout oppose – mais qui connaissent chacun la véritable identité de l’autre – vont être amenés à se rapprocher, tout en continuant à dissimuler l’un à l’autre leurs propres desseins.

The Age of Shadows – Réalisé par Kim Jee-Woon

Kim Jee-Woon est un réalisateur sud-coréen qui réalise des long-métrages depuis 1998 et sa filmographie compte à ce jour 8 films. Me concernant, j'ai découvert le travail de ce réalisateur avec son film « J'ai rencontré le diable », un thriller sanglant, efficace et intense qui m'avait énormément marquer. Puis il y a eu « Le Dernier Rempart », une série b sympathique qui marque sa première expérience sur le sol américain avec notamment Arnold Schwarzenegger dans le rôle principal. Et depuis 2013, ce réalisateur dont la réputation grandissante n'est plus à prouver chez nous, revient avec un pur produit coréen, l'immense et pas encore distribué en France « The Age of Shadows ».

Lee Jung-chool est capitaine dans la police coréenne, pendant l'occupation japonaise des années 20. Une situation qui divise le pays et qui créée énormément de tension, à cause notamment de la résistance coréenne qui n'hésite pas à faire des attentats pour déstabiliser le régime japonais. Aux abois, la résistance cherche par tous les moyens à financer leurs actions et lors de l'une de ces tentatives, ils se font trahir et malgré la présence Lee Jung-chool, aucun ne survivra. Un choc pour ce capitaine, car c'était une personne qu'il connaissait et qu'il n'a pu sauver. Toutefois, il n'a pas le temps de souffler et doit prendre contact Kim Woo-jin, un membre de la résistance et remonter la filière jusqu'au chef. Une nécessite pour les autorités, car ils préparent des attentats. Sauf que Lee Jung-chool est aussi un espion qui joue dans les deux camps, mais jusqu'à quand …


La colonisation de la Corée par le japon commence par un protectorat en 1905 (Même si des 1897, un traités militaire liés les deux pays) jusqu'au traité d'annexion en 1910 faisant de la Corée la nouvelle province du Japon, la province Chosun. La politique japonaise s'articule autour de l'économie, l'éducation et d'une bonne dose de propagande, notamment en promouvant la culture japonaise. Très tôt cela provoquera l'hostilité des coréens et comme l'influence du Japon sera de plus en plus grande, n'hésitant pas a user de la force pour se faire respecter. La résistance du peuple coréen se fera tout aussi forte, que cela soit au début par des manifestations ou alors jusqu'aux attentats purs et simples. C'est dans ce contexte trouble qui prit fin en 1945, que Kim Jee-Woon nous transporte et pose son film d'espionnage. Une fresque magnifique, forte, humaine et sans concession sur les affres d'un pays en pleine occupation.

Si le scénario qu'a écrit Kim Jee-woon est un film d'espionnage, il reprend avant toutes choses, les codes d'un film de guerre, notamment avec l'évocation de la colonisation qui n'est pas sans rappeler celle d'un pays en pleine occupation. Le récit se concentre alors sur le chassé croisé entre deux hommes, Kim Woo-jin et Lee Jung-chool. Le premier est un membre imminent de la résistance, quand le second est un policier (espion) qui doit le traquer. Une idée de base que le réalisateur à su transcender sans jamais tomber dans le manichéisme, car loin de se contenter d'une vision binaire et sans intérêt, il dresse le portrait de deux hommes complexes aussi différent qu'intimement liée dans leur chair, par ce pays qu'ils aiment profondément, la Corée ! Le résistant et le policier se font constamment violence, pactise avec l'ennemi pour l'un, quand l'autre jouera sans cesse sur son positionnement, questionnant ses propres motivations. Et c'est la dedans que l'on retrouve toute la conviction qui les anime, qui les fait douter ou s'interroger. Une radicalité qui n'a qu'une finalité, que pour toutes luttes, l'important ce ne sont pas les hommes mais bien les idées …

Des idées, le réalisateur coréen n'en manque pas ! Il nous raconte son histoire de la plus belle des manières, avec passion et précision. Kim Jee-woon se fait comme le plus prestigieux des chefs d'orchestre, l'introduction, rapide, dure, violente et inflexible est admirablement bien maîtrisé. Minutieux dans son découpage, parfaitement rythmé, le réalisateur nous livre ici sa note d'intention, cela sera intense et ça pendant deux heures vingt. Il faut bien sur ajouter à cela, une ambiance paranoïaque particulièrement réussis, notamment grâce à la première partie qui installe les différents nœuds de l'intrigue, jusqu'au climax central du train ! Un élément prépondérant dans la narration qui marque une bascule nette dans l'intrigue. Le film passe alors de l'espionnage au thriller pur et dur, qui ne fera que gagner en puissance, jusqu'à atteindre son paroxysme dans une séquence brillante, dominée par le tempo du boléro de Ravel. C'est sublime, inspirant et émouvant, une maestria que l'on retrouve a tous les niveaux dans ce film, que cela soit pour commencer par l'impeccable direction artistique de Cho Hwa-sung, les costumes de Jo Sang-gyeong, la délicieuse partition musicale de Mowg qui sait se taire quand il le faut (Très beau travail de sound design annexe qui accentue la violence de certaines séquences) jusqu'au sublime travail du chef opérateur Kim Ji-yong, un bonheur pour les yeux …

Quant au casting, il est d'une grande qualité et repose essentiellement sur deux acteurs talentueux, Gong Yoo qui a cartonnée dans « Dernier Train pour Busan » et l'incontournable Song Kang-ho, le fabuleux détective de « Memories of Murder ». Lorsque j'ai découvert Gong Yoo dans « Dernier Train pour Busan », il ne m'avait pas spécialement convaincu, a cause notamment de l'insupportable personnage qu'il interprétait éminemment détestable. Toutefois je suis bien obligé de reconnaître qu'il est bien plus bon que ce que je croyais et qui semble avoir une belle palette de jeu ! Ambiguë, charmeur et téméraire, il campe un résistant sur de ses valeurs, qui sait la tache qu'il attend dont on sent la fragilité derrière la façade de marbre. Song Kang-ho est un acteur immense qui a une vrai profondeur de jeu et qui le démontre une fois de plus ici, en étant l'un des vecteurs d'émotions du récit. Il joue un personnage aux multiples facettes, le citoyen coréen, le policier et l'espion. Trois personnalités qui se confrontent au gré des péripéties, mettant continuellement en porte à faux le personnage et cela plus d'une fois ! Le torturant jusqu'au plus profond de son être ! Un dilemme moral aussi bien pour nous que pour l'interprète, car on a eu le temps de s'attacher et de s'identifier un tant soi peu à lui. Une humanité qu'il porte sans sourciller, jouant sur sa bonhomie naturelle pour mieux nous prendre à contre pied. 


Excellent !

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